La Zambie et la République démocratique du Congo (RDC) ont mis fin à une nouvelle crise commerciale brève, mais intense. Les deux pays se sont accordés dans l’après-midi de ce 12 août 2024 pour rouvrir leurs frontières après sa fermeture durant le week-end. Cette décision intervient après des négociations d’urgence entre les ministres du Commerce des deux pays, mettant un terme à un différend qui menaçait de perturber un des plus importants corridors mondiaux d’approvisionnement en cuivre.
La crise a débuté lorsque la RDC a unilatéralement interdit l’importation de bière, de boissons gazeuses et de chaux en provenance de Zambie, une mesure visant à stimuler la production locale. Cette décision a provoqué des protestations en Zambie, poussant Lusaka à fermer ses postes-frontière par mesure de sécurité.
La fermeture a immédiatement suscité des inquiétudes quant à son impact sur l’industrie minière régionale, la RDC étant le deuxième producteur mondial de cuivre et dépendant fortement des routes zambiennes pour ses exportations. « Cet incident souligne l’importance d’un dialogue continu entre nos nations », a d’ailleurs déclaré le ministre zambien du Commerce, Chipoka Mulenga.
L’accord conclu permet désormais aux produits zambiens d’entrer en RDC sans restrictions, mais pour les boissons interdites, seuls les produits qui avaient déjà obtenu un certificat d’importation pourront passer. Les observateurs restent toutefois prudents quant à la stabilité à long terme de cet arrangement. L’Association des Manufacturiers de Zambie a exprimé ses préoccupations concernant les implications durables de telles perturbations sur les chaînes d’approvisionnement régionales et l’emploi. Un porte-parole de l’association a souligné que « ces incidents répétés menacent la stabilité de nos opérations et, par conséquent, l’emploi dans la région ».
Les marchés mondiaux des métaux restent attentifs
Les échanges commerciaux entre la Zambie et la RDC ont connu certains changements au premier trimestre 2024. Les exportations zambiennes vers la RDC ont atteint 349,3 millions de dollars, mais sont en baisse par rapport aux 407,8 millions de dollars du premier trimestre 2023. Cependant, la RDC reste le troisième marché d’exportation pour la Zambie, soulignant l’importance continue de cette relation commerciale.
Du côté des importations, la Zambie a importé pour 43,7 millions de dollars de produits congolais au premier trimestre 2024, une baisse significative par rapport aux 63,2 millions de dollars de la même période en 2023. Malgré ces fluctuations, la RDC demeure un partenaire commercial crucial pour la Zambie, avec un volume d’échanges total de 393 millions de dollars pour le trimestre.
Ce n’est pas la première fois que des tensions surgissent à ce poste-frontière stratégique. Les chauffeurs de camion se plaignent depuis longtemps de harcèlement et de problèmes de sécurité du côté congolais. En septembre 2022, une protestation similaire avait bloqué le trafic pendant plusieurs jours, nécessitant l’intervention de hauts responsables gouvernementaux des deux pays.
Alors que la situation se normalise, les marchés des matières premières restent attentifs aux développements futurs. Même brève, une interruption à cette frontière peut avoir des répercussions significatives sur les marchés mondiaux des métaux. Sur le marché des matières premières, le prix du cuivre se stabilise en dessous des 9000 dollars, mais lundi, il a augmenté de 8400 à 8 950 dollars.
Idriss Linge
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Internet et les technologies de l’information et de la communication sont considérés par les Nations unies comme un levier indispensable à l’atteinte de plusieurs Objectifs de développement durables (ODD). Mais il est impératif de les utiliser à bon escient. C’est cet appel que le Bureau provincial de la jeunesse de Kinshasa a lancé ce lundi 12 août, Journée internationale de la jeunesse, qui se célèbre sous le thème : « Le progrès à portée de clic : la jeunesse et le secteur numérique au service du développement durable ».
Le Bureau provincial a appelé « la Jeunesse congolaise en général et kinoise en particulier à user des clics pour la sécurité et la salubrité de notre ville province de Kinshasa ; capitale, siège des institutions et miroir de la RDC ». Un appel qui s’aligne avec l’ambition de transformation de Kinshasa par le numérique, dévoilée le 3 août dernier par le nouveau gouverneur de la ville, Daniel Bumba Lubaki, lors de la présentation de son plan d’action 2024-2028 pour la capitale.
Mais pour que les « clics » favorisent la sécurité et la salubrité attendues à Kinshasa, il est nécessaire d’améliorer la faible qualité de vie numérique en RDC, en plus d’insister sur une éducation civique. Cela suppose améliorer l’accès à l’Internet mobile dont le taux de pénétration avoisine 51%, afin d’obtenir la contribution du maximum de jeunes. Revoir le coût d’accès à Internet est également important.
Tableau comparatif qualité de vie numérique 2023
Source : Surfshark
A travers les clics pour le progrès que prône cette journée internationale de la jeunesse, le Bureau provincial de la jeunesse de Kinshasa y voit l'opportunité de lancer une mobilisation générale dans la province pour dénoncer les injustices, sensibiliser sur l’équité, interpeller sur la responsabilité commune, militer pour la paix. Des défis qui entravent l’éclosion d’un climat propice au développement social et économique.
Muriel Edjo
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La récente fermeture de trois points de passage frontaliers entre la République Démocratique du Congo (RDC) et la Zambie introduit une complexité dans les échanges commerciaux entre ces deux pays voisins. Cette décision unilatérale de Lusaka, bien que présentée comme « temporaire », est de nature à perturber un flux commercial estimé à 1,8 milliard de dollars en 2023, selon des statistiques officielles.
Cette situation survient dans un contexte où la RDC a récemment suspendu pour 12 mois l’importation de certaines boissons zambiennes, selon son ministre du Commerce extérieur, dans le cadre d’une stratégie visant à soutenir la production locale de ce type de produits. La Zambie, pour sa part, justifie sa décision par la nécessité de prévenir une possible importation de risques d’instabilité sur son territoire, suite à des manifestations dans les localités frontalières avec la RDC contre des restrictions d’activités sur ces boissons.
Les arbitrages sont difficiles pour les dirigeants zambiens. En 2023, par exemple, la Zambie a exporté pour 1,6 milliard de dollars vers la RDC, contre seulement 182 millions de dollars d’importations. La RDC représente le troisième marché d’exportation pour ce pays, une position maintenue même au premier trimestre 2024 où les volumes vendus ont continué de baisser. Ainsi, cette fermeture des frontières pourrait donc pénaliser davantage les fournisseurs zambiens, dont le volume des activités pourrait reculer.
De son côté, le gouvernement congolais semble déterminé à rééquilibrer ses relations économiques, historiquement désavantageuses pour elle, avec ses voisins. Les premiers résultats sont encourageants : au premier semestre 2024, la RDC a enregistré un excédent commercial de 5,4 milliards de dollars, contre un déficit de 330 millions sur la même période en 2023. Cela lui permet de renforcer ses réserves de change, et ainsi défendre la valeur de sa monnaie, qui est le principal moteur de la hausse des prix dans son économie.
Néanmoins, des défis persistent. La partie sud-est de la RDC dépend fortement des importations zambiennes pour certains produits de première nécessité économique, comme le sel ou le soufre. De plus, si la situation se prolonge, la rareté des produits zambiens risquerait de déséquilibrer l’offre et par conséquent, on aura une accélération dans la hausse des prix, contrairement aux objectifs du gouvernement en la matière.
Mais au-delà des risques à court terme, cette situation révèle la volonté de Kinshasa de reconquérir une certaine souveraineté économique, notamment sur les produits de grandes consommations. Toutefois, il est crucial de gérer cette transition avec prudence pour éviter des perturbations économiques majeures et maintenir des relations commerciales stables avec ses voisins.
En fin de compte, cette situation, bien que contraignante à court terme, pourrait catalyser une redéfinition bénéfique des relations commerciales dans la région, avec des implications potentielles sur l’intégration économique de l’Afrique centrale et australe. La clé résidera dans la capacité des deux pays à négocier un équilibre entre la protection de leurs intérêts nationaux et le maintien d’un cadre d’échanges dynamique et mutuellement avantageux.
Idriss Linge
En Afrique, le manioc est l’une des principales cultures alimentaires. IL présente donc un important potentiel de développement. En RDC, selon la Banque mondiale, le développement de la chaîne de valeur du tubercule pourrait stimuler le tissu agro-industriel, créant ainsi de nombreuses opportunités économiques et d’emplois. Explications.
Intitulé « Mémorandum économique-pays pour la République Démocratique du Congo. Voies d’accès à la diversification économique et l’intégration commerciale régionale », le rapport publié en septembre 2023 met d’abord en évidence la place stratégique de la RDC dans l’offre mondiale en tubercules ainsi que l’importance de la culture au niveau local.
Une culture névralgique
Le pays francophone le plus peuplé du monde a produit 48,7 millions de tonnes de manioc en 2022, selon la base de données de la FAO (FAOStat), soit environ 15% du stock global. Ce volume en fait le second fournisseur mondial derrière le Nigeria (60,8 millions de tonnes).
Plus globalement, depuis 2001, le manioc a vu sa production presque tripler, passant de 15,4 millions de tonnes à 42,7 millions de tonnes en 2022 alors que celle de l’ensemble des autres racines et tubercules a été multipliée par deux selon les données de la Banque centrale du Congo (BCC) compilées par l’Agence Ecofin.
Présentant plusieurs avantages comme la tolérance aux conditions météorologiques extrêmes, dont la sécheresse, la faible utilisation d’intrants, la souplesse de la récolte (la racine peut demeurer en terre un certain temps après être arrivée à maturité), le manioc représente actuellement près de 40% de la surface récoltée et 70% de la production agricole totale de la RDC.
D’après les données de la FAO, la consommation annuelle par tête du manioc en RDC avoisine les 500 kg de racines fraîches, soit environ 150 kg de farine fermentée, ce qui en fait la plus élevée d’Afrique centrale et l’une des plus élevées au monde.
Si comme dans les autres pays d’Afrique subsaharienne, le manioc était cultivé jusqu’à un passé récent pour l’autoconsommation, il s’agit désormais d’un produit perçu comme ayant une valeur commerciale à part entière. Cultivé dans toutes les provinces du pays, le manioc alimente les flux économiques vers les principales villes ainsi que les relations d’affaires entre les acteurs de la chaîne de valeur, qui tirent profit de la place du tubercule dans la satisfaction des besoins caloriques des ménages.
En effet, selon les données de l’Institut international d’agriculture tropicale (IITA), le manioc fournit plus de 60% des besoins énergétiques de la population congolaise. Il représente la denrée de base la plus importante, consommée sous différentes formes telles que la chickwangue (bâton de manioc), le fufu (pâte alimentaire à base de manioc mélangé ou non au maïs) ou sous forme de manioc bouilli ou grillé. D’après les données de la FAO, la consommation annuelle par tête du manioc en RDC avoisine les 500 kg de racines fraîches, soit environ 150 kg de farine fermentée, ce qui en fait la plus élevée d’Afrique centrale et l’une des plus élevées au monde.
Création de valeur ajoutée et diversification économique
Alors qu’actuellement le pays reste un importateur net de produits de base, la Banque mondiale souligne qu'un renforcement de la filière manioc pourrait jouer un rôle crucial dans l’émergence d’une agro-industrie. Avec un investissement important dans les équipements pour une transformation rapide, aussi bien en milieu rural que dans les zones industrielles, la RDC pourrait limiter les pertes de produits frais qui interviennent 48 à 72 heures suivant la récolte et se positionner durablement comme un fournisseur majeur de produits dérivés tels que la farine de manioc de haute qualité (HQCF).
Ce produit dérivé peut ainsi trouver sur le marché intérieur des débouchés importants dans la panification et la pâtisserie en tant que produit de substitution pour le blé, permettant ainsi de réduire la facture des importations et de contribuer à la sécurité alimentaire. D’après la Banque mondiale, l’impact de la guerre en Ukraine a déjà donné un coup de fouet aux efforts nationaux de réduction de la dépendance vis-à-vis du blé, conduisant notamment en avril 2022 à l’adoption par le gouvernement d’un projet d’incorporation, à hauteur de 20%, de la farine de manioc dans la production de pain.
Banque mondiale : « La demande croissante des pays occidentaux où le manioc devient un ingrédient alimentaire de base constitue une opportunité croissante de cibler les ports stratégiques des Pays-Bas et de la Belgique qui servent de grands centres de distribution pour la majeure partie du continent ».
Sur le plan macro-économique, le développement d’une industrie autour du manioc soutiendrait également les efforts de diversification de l’économie. Le pays qui partage ses frontières terrestres avec 9 voisins régionaux pourrait ainsi s’engager dans l’exportation en tirant profit de la demande et peut aussi cibler des marchés européens où le produit est de plus en plus convoité.
« La demande croissante des pays occidentaux où le manioc devient un ingrédient alimentaire de base constitue une opportunité croissante de cibler les ports stratégiques des Pays-Bas et de la Belgique qui servent de grands centres de distribution pour la majeure partie du continent », indique l’institution.
Des défis à relever
Si la RDC est un acteur majeur de la filière manioc, de nombreux obstacles devront être surmontés pour tirer le meilleur des opportunités qui s’annoncent et générer un maximum de valeur ajoutée sur le territoire national. En effet, si le pays trône à la seconde place dans la production, il reste en retard en matière de rendement avec seulement 8,15 tonnes par hectare en 2021 contre 10 tonnes pour la moyenne mondiale et très loin du record mondial de 41 tonnes, selon les données de la FAO. Il existe donc encore en RDC des opportunités significatives pour augmenter la production et répondre à la demande croissante pour les produits à base de manioc.
D’après la Banque mondiale, un soutien public renforcé à la filière et l’application de technologies agricoles intelligentes par rapport au climat pourraient permettre de doubler ou de quadrupler à terme le rendement du manioc dans le pays. Par ailleurs, les investissements dans la recherche et le développement de nouvelles variétés, la vulgarisation des bonnes techniques agricoles ainsi que la gestion intégrée de la fertilité des sols peuvent aussi contribuer à l’amélioration de la productivité.
Le document souligne ainsi que les micros, petites et moyennes entreprises (MPME) actives dans la chaîne de valeur du manioc pâtissent des coûts associés à la lourdeur bureaucratique, de la charge fiscale et parafiscale, des difficultés d’accès à la terre et au financement, du déficit d’infrastructures fiables (électricité et transport routier).
Au-delà des défis dans l’accroissement de la production, le rapport met en avant un environnement des affaires encore peu propice au développement de l’agro-industrie. Le document souligne ainsi que les micros, petites et moyennes entreprises (MPME) actives dans la chaîne de valeur du manioc pâtissent des coûts associés à la lourdeur bureaucratique, de la charge fiscale et parafiscale, des difficultés d’accès à la terre et au financement, du déficit d’infrastructures fiables (électricité et transport routier).
Face à ces défis, la Banque mondiale souligne que des solutions existent pour non seulement pérenniser les activités et les emplois créés par les MPME déjà présentes dans le secteur, mais aussi attirer de nouveaux investissements sur l'ensemble de la chaîne de valeur. Il s’agit notamment de la rationalisation des procédures administratives pour favoriser l’accès à la terre, de l’amélioration de l’accès des MPME au financement, par le biais d’outils adaptés, de l’élargissement des zones économiques spécialisées pour la transformation du tubercule ou encore du développement de programmes d’adaptation au changement climatique dans les zones de production de la culture.
Espoir Olodo
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L’inflation en République démocratique du Congo a ralenti à 15,25% début août, contre 23,75% fin janvier 2024, selon des données de la Banque centrale (BCC). Ce ralentissement est attribué à « la stabilité sur le marché des changes suite à l’orientation restrictive des politiques budgétaire et monétaire », selon une version officielle reprise par la BCC.
Les prix alimentaires, qui représentent 67,8% de l’indice, restent le principal moteur de l’inflation. Mais le secteur des transports impacte également l’inflation, notamment à cause de la hausse mondiale et locale des prix des carburants. Le marché local en général est contraint de s’adapter à cette augmentation, qui affecte l’ensemble de la chaîne de consommation.
À Kinshasa, mégapole de 20 millions d’habitants, le carburant est crucial pour l’électricité et la mobilité. Les variations de prix influencent largement l’économie locale. L’impact sur l’ensemble du pays est plus difficile à évaluer en raison des disparités régionales.
Le franc congolais se stabilise autour de 2850 pour un dollar, limitant le coût des importations. Les autorités attribuent cette amélioration aux politiques budgétaires et monétaires mises en place. Mais il y a aussi lieu de relever une amélioration des prix des principales matières premières (cuivre notamment), qui ont soutenu la balance commerciale des biens.
Malgré ces indicateurs positifs, la majorité des Congolais peinent à ressentir une amélioration concrète, leurs revenus stagnant face à une inflation certes ralentie, mais persistante. De nouvelles mesures pourraient être envisagées pour atteindre l’objectif national de 11% d’inflation.
Le gouvernement maintient des mesures de soutien, comme la suppression de la TVA sur le carburant et le pain. Cependant, une refonte structurelle des politiques publiques semble nécessaire, le budget de fonctionnement de l’État restant disproportionné par rapport aux investissements. Les six premiers mois de 2024 montrent une tendance à l’inversion, avec un objectif gouvernemental d’augmenter les dépenses en capital, selon le FMI. Les récents travaux sur les routes de desserte agricole s’inscrivent dans cette stratégie, dont les effets restent à observer.
Idriss Linge
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Alors que le changement climatique présente de nombreux risques sur les systèmes agricoles tributaires des précipitations, le renforcement des investissements dans l’irrigation offre d’immenses possibilités pour stimuler la production agricole en RDC. C’est ce qu’indique le Rapport national sur le climat et le développement (CCDR) pour le pays publié par la Banque mondiale en novembre dernier.
Si la RDC dispose de quelque 900 millions de mètres cubes d’eaux de surface et 420 millions de mètres cubes d’eaux souterraines, le secteur agricole ne profite pas encore de ces ressources en eau qui sont parmi les plus importantes du globe. Sur les 8 millions d’hectares actuellement cultivés, la superficie agricole irriguée reste en effet inférieure à 90 000 hectares.
Et pourtant, d’après la Banque mondiale, l’agriculture irriguée peut être au moins deux fois plus productive que l’agriculture pluviale. Elle est en plus l’une des premières conditions pour améliorer la résilience des chaînes de valeur agricoles aux changements climatiques. C’est pourquoi l’institution financière plaide pour une hausse des investissements publics et une mise en place des incitations financières pour accompagner l’irrigation gérée par les agriculteurs. Selon le rapport, avec de telles mesures, les superficies mises en valeur peuvent augmenter significativement.
Selon le premier scénario qui est le plus faible, le pays pourrait atteindre 200 000 hectares de terres irriguées à l’horizon 2040 avec un financement public supplémentaire de 43 millions $ par an et un effet de levier sur les investissements propres des agriculteurs de 8 millions $ par an. Le second dit « modéré » cible 400 000 ha tandis que le scénario le plus ambitieux devrait permettre le développement d’un million d’hectares de terres irriguées, ce qui ferait de l’agriculture irriguée, le second utilisateur d’eau derrière l’électricité, d’ici 2050.
Dans tous les cas de figure, la Banque mondiale estime que les ressources en eau disponibles sont suffisantes pour soutenir la demande en eau d’irrigation non seulement pour les spéculations de grande valeur économique comme les cultures horticoles et maraîchères, mais aussi les denrées de base comme le maïs, le manioc et le riz.
Face à cette opportunité, les auteurs du rapport recommandent le développement de l’irrigation avec la participation des producteurs d’une manière graduelle à partir des zones à fort potentiel, notamment celles où la demande des agriculteurs est forte, les marchés d’écoulement et les ressources en eau accessibles, ainsi que les régions qui sont sujettes à des épisodes de sécheresse plus fréquents.
Par ailleurs, les experts mettent en avant la nécessité d’établir un cadre règlementaire et institutionnel permettant aux agriculteurs d’améliorer leurs connaissances des pratiques d’irrigation climato-intelligentes ainsi que l’accès aux financements et aux solutions technologiques abordables.
Espoir Olodo
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La RDC et la compagnie Ivanhoe Mines tablent sur 2025 pour la résolution des problèmes persistants liés à l’instabilité de l’approvisionnement électrique dans le sud du pays et qui impactent le complexe minier de Kamoa-Kakula. Ivanhoe a indiqué début juillet qu’elle travaille avec la Société nationale d’électricité (Snel) pour apporter d’ici cette échéance « des solutions aux causes identifiées de l’instabilité ».
Dans le détail, les deux parties collaborent pour augmenter la capacité de transmission et améliorer la fiabilité du réseau. Les travaux, dont le coût n’a pas été communiqué, sont financés, apprend-on, par la filiale locale d’Ivanhoe Mines.
L’instabilité électrique impacte la production de cuivre
L’instabilité du réseau électrique a entrainé des interruptions fréquentes de l’approvisionnement en électricité, ce qui a compliqué l’extraction dans les zones à haute teneur de la mine Kakula. Ces zones sont particulièrement sensibles aux interruptions électriques, car la disponibilité des pompes à eau souterraine, cruciales pour l’exploitation, est réduite en cas de coupure de courant.
Selon les données d’Ivanhoe, ces difficultés ont entrainé une baisse de la production au premier trimestre de 8% à 86 203 tonnes. Au deuxième trimestre, le complexe Kamoa-Kakula a livré 100 812 tonnes, portant le total du premier semestre 2024 à 186 925 tonnes (en baisse de 5% en glissement annuel).
Pourtant, la compagnie a maintenu ses prévisions de production pour l’exercice 2024 (entre 440 000 et 490 000 tonnes contre 393 551 tonnes en 2023). Cela peut s’expliquer par la mise en service en juin d’un nouveau concentrateur censé augmenter la capacité de traitement du projet, mais aussi par les solutions à court terme trouvées en attendant la mise en œuvre complète des plans convenus avec la Snel. Depuis mi-mars, Ivanhoe importe une partie de son électricité de la Zambie et du Mozambique, tout en poursuivant l’extension de sa capacité de génération d’électricité de secours sur le site.
La problématique du déficit énergétique et son impact sur le secteur minier
La situation actuelle sur la plus grande mine congolaise de cuivre remet sur le devant de la scène la problématique du déficit énergétique de la RDC et son impact sur le secteur minier.
Un rapport de l’Observatoire d’études et d’appui à la responsabilité sociale et environnementale (Oearse), publié en 2021, indiquait que dans le secteur minier congolais, « la différence entre l’offre et la demande d’électricité est très significative et affecte la performance et le rendement du secteur ».
Le même document indique que « ce déficit qualitatif et quantitatif de l’énergie électrique handicape les entreprises et accroît leurs coûts de 10 à 15% », et met en évidence des pertes potentielles en matière de recettes fiscales et d’exportations pour la RDC, ainsi qu’un manque à gagner en ce qui concerne les revenus et les redevances pour les populations, en raison de la non-valorisation et la sous-transformation (conséquentes) des ressources minérales.
« Dans le code minier révisé, nous avons mis cette obligation de transformer localement les minerais, le problème dont [sic] fait face la RDC est lié à l’énergie. Rien que dans le Katanga aujourd’hui, il y a un déficit de 1 200 MW. Seul l’État peut répondre à ce déficit […] », déclarait Albert Yuma, alors président de la Fédération des Entreprises du Congo (FEC), cité par l’Oearse.
Plusieurs pistes de solutions s’offrent à la RDC pour apporter des réponses aux problèmes énergétiques. Au-delà des espoirs que suscite le projet hydroélectrique Grand Inga, le pays peut également explorer la piste de la coopération régionale. Par exemple, début juillet, les sociétés Trafigura et ProMarks ont conclu un protocole d’accord pour étudier la viabilité technique et économique de la construction d’un interconnecteur électrique haute tension de 2 000 MW. Ce projet vise à exporter l’excédent d’électricité produite par les barrages hydroélectriques du nord de l’Angola vers la Copperbelt en RDC et en Zambie.
Louis-Nino Kansoun
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Une délégation de la société turque IF Elektronik Ltd vient de séjourner en République démocratique du Congo. Lundi 29 juillet, elle s’est entretenue avec Séraphin Umba Kapepe, le directeur de cabinet du ministre des Postes, Télécommunications et Numérique, sur la réalisation d’une base de données couplée au système informatique turc MEIR (Mobile Equipment Identity Register).
Le système MEIR, crée en 2008 par IF Elektronik Ltd, est depuis lors utilisé par l’État turc pour enregistrer les équipements mobiles et garantir la collecte exacte des taxes et des frais fixés par le gouvernement. Le système permet également d’assurer l’exploitation légale de tous les appareils mobiles dans le pays, empêchant l’entrée de téléphones clonés, contrefaits, ou volés, contribuant ainsi à un écosystème mobile légal.
Orthan Karadogan, le directeur général d’IF Elektronik Ltd, a expliqué que, selon les calculs effectués par la société, « le système génèrera un revenu annuel minimum de 342 millions de dollars à la République démocratique du Congo avec une croissance annuelle du marché estimée à 10% ». Il a proposé à l’État congolais l’introduction du système dans le pays sous le modèle BOT (Build-Operate-Transfer) de 10 ans. « Tous les coûts d’investissement initiaux, s’élevant à 50 millions de dollars, seront pris en charge par IF Elektronik Ltd, sans demande de capital de la part de l’État congolais. IF Elektronik couvrira tous les frais de matériel, de logiciels, de licences, d’installation et d’exploitation », a-t-il indiqué, soulignant que le projet peut être opérationnel en 6 mois.
Plusieurs propositions ont également été faites au gouvernement par IF Elektronik Ltd dans la suite du projet MEIR : le recrutement 30 ingénieurs locaux. Ces derniers seront formés sur Unix, Oracle Big Data, et le système MEIR afin qu’ils reprennent la gestion de la base de données au terme du contrat BOT de 10 ans. L’ouverture d’un centre de formation en codage avec une priorité accordée aux étudiants. La création conjointe d’un Centre de compétences pour commercialiser le projet aux pays voisins.
La mission de prospection d’IF Elektronik Ltd en RDC intervient deux mois après celle effectuée le 3 juin à Libreville au Gabon. Les représentants de la société y ont discuté avec le ministre gabonais de l’Économie numérique et des Nouvelles technologies de l’information, le général de brigade Bonjean Rodrigue Mbanza. Fruit de plusieurs mois d’échange, cette rencontre marquait une étape de plus vers un accord de partenariat ferme.
La solution de sécurité mobile M.E.I.R que propose le turc IF Elektronik Ltd vise presque les mêmes objectifs que le Registre des appareils mobiles (RAM) déployé en 2020 par le gouvernement de RDC. Les Congolais doivent y enregistrer le numéro d’identité internationale de leur téléphone (IMEI). Une mesure destinée à combattre les appareils contrefaits, source de divers risques sanitaire, sécuritaire et économique.
Muriel Edjo
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En RDC, l’amélioration de la gouvernance foncière est un enjeu majeur pour le développement d’une agriculture durable et résiliente face au changement climatique. C’est ce qu’indique le Rapport sur le climat et le développement (CCDR) pour le pays, publié par la Banque mondiale en novembre dernier.
Alors que dans le pays, les petits producteurs fournissent l’essentiel de l’offre alimentaire comme dans le reste de l’Afrique subsaharienne (hors Afrique du Sud), ceux-ci doivent faire face au défi de l’insécurité foncière. D’après l’institution, la plupart des terres cultivées n’ont pas de titre de propriété et ne sont pas correctement enregistrées. Une situation qui freine l’investissement à long terme et plombe l’amélioration de la productivité agricole au niveau des exploitants.
Dans les zones rurales, la Banque mondiale rappelle que 16 millions de petits exploitants congolais constituent l’épine dorsale de la sécurité alimentaire et de l’agriculture, avec une propriété foncière moyenne de 1,6 hectare. Dans un tel contexte, les auteurs du rapport estiment qu’une bonne gouvernance foncière consisterait en la mise en œuvre de politiques et de lois visant la sécurisation des droits fonciers, tout en reconnaissant l’usage durable des terres et des droits des communautés coutumières.
Un tel cadre réglementaire qui serait associé à la numérisation des registres fonciers ainsi qu’un renforcement du système judiciaire permettrait notamment de lutter contre les expropriations foncières et de contribuer à la résilience de la population agricole face aux chocs. Ce sujet est particulièrement sensible en ce qui concerne les femmes qui éprouvent déjà des difficultés socio-économiques à accéder à la terre et dont 84% de la population en âge de travailler dépend de l’agriculture comme source de revenus et d’emplois contre 62% pour les hommes, selon l’organisation.
Au-delà des petits exploitants, la Banque mondiale souligne que les investisseurs étrangers font aussi face à de nombreux défis pour accéder aux terres rurales. L’institution financière cite notamment l’obligation de céder 51% de leurs parts à un partenaire local conformément à la loi agricole de 2011.
Il faut noter que la Banque mondiale n’est pas la seule organisation à pointer du doigt les défis liés à la gestion du foncier. Dans son dernier rapport statistique des projets d’investissements agréés en RDC sur la période 2019-2023, l’Agence nationale pour la promotion des investissements (Anapi) a souligné que cette question compte parmi les principaux freins au développement du secteur agricole, aux côtés du manque de routes de desserte agricole et de l’absence d’une offre financière axée sur l’agriculture.
Espoir Olodo
La Société financière internationale (SFI), membre du groupe de la Banque mondiale, a récemment affirmé son intérêt pour les secteurs du logement et de l’urbanisme en République Démocratique du Congo (RDC). Malick Fall, qui représente la SFI au Burundi, au Congo et en RDC, a exprimé la volonté de l’institution de soutenir le secteur privé en vue de promouvoir le développement durable à travers des initiatives stratégiques dans ces domaines, selon des propos rapportés par l’Agence congolaise de presse. Malick Fall s’est exprimé lors de sa visite au ministre congolais en charge de l’urbanisme et de l’habitat, Pius Muabilu.
Cette annonce survient dans un contexte où la RDC fait face à un besoin de logement estimé à 4 millions d’unités, selon des données d’un rapport 2023 d’ONU Habitat. Ce chiffre devrait rapidement augmenter compte tenu de la croissance démographique du pays. La population est projetée à plus de 278 millions d’habitants en 2050, dont 60% vivant dans les villes. Par ailleurs, le pays devrait continuer d’attirer de nombreux investisseurs en quête d’opportunités sur les minerais de la transition énergétique.
Les opportunités d’investissement dans le secteur de l’immobilier et de l’urbanisme en RDC sont donc nombreuses, allant de la construction directe à la prestation de services d’aménagement, tels que le mobilier locatif, les installations d’infrastructures électriques ou d’eau, et autres services d’aménagement intérieur. Cependant, il y a aussi des défis à relever, notamment en ce qui concerne la complexité de la question foncière et la nécessité de renforcer la prévision et la sécurité juridiques des promoteurs immobiliers.
L’engagement de la SFI dans le secteur peut donc se traduire par plusieurs actions, comme on l’a déjà vu dans d’autres pays. Elle peut ainsi aider à mobiliser des capitaux privés de long terme pour le secteur du logement, en renforçant les capacités du secteur bancaire national, par des lignes de garanties ou de financement longs. Elle peut également travailler avec le gouvernement pour renforcer la sécurité juridique des promoteurs immobiliers.
De plus, la SFI peut encourager à l’adoption de technologies et de pratiques innovantes dans la construction et le financement du logement, afin de rendre les logements plus abordables et accessibles. Cela prendrait la forme d’une assistance technique aux acteurs du secteur privé pour améliorer leurs compétences et leur efficacité dans le domaine du logement, ou encore la promotion des partenariats public-privé.
Une collaboration entre le gouvernement, les institutions internationales et le secteur privé est essentielle pour répondre à la demande croissante de logements, développer la chaîne des valeurs du business de l’immobilier, tout en améliorant les conditions de vie de la population congolaise. Le secteur de l’immobilier et de l’urbanisme possède ainsi le potentiel de devenir un levier de croissance important pour le pays, diversifiant son économie actuellement concentrée sur le secteur minier.
Idriss Linge