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TÊTES D'AFFICHES

TÊTES D'AFFICHES (62)

La nouvelle a été peu couverte en Afrique, pourtant c’est l’un des grands noms de la pensée africaine que le continent vient de perdre avec Valentin-Yves Mudimbe (photo). Né en 1941 à Likasi, dans l’actuelle RDC (anciennement Jadotville, NDLR), le Congolais avait d’abord emprunté la voie monastique avant de renoncer à un destin de prêtre pour poursuivre des études supérieures.

Diplômé de philosophie à l’Université catholique de Louvain en 1970, il enseigne à l’Université nationale du Zaïre, puis s’exile aux États-Unis en 1979, fuyant les tensions politiques. À l’Université de Duke, il impose sa marque, devenant l’un des piliers des études africaines et postcoloniales.

Valentin-Yves Mudimbe est surtout reconnu pour son ouvrage phare, The Invention of Africa (1988). Dans cette analyse rigoureuse, il démonte la fabrication occidentale de l’altérité africaine, dénonçant les récits biaisés qui continuent d’enfermer le continent dans des représentations coloniales. Ce livre invite à repenser radicalement les savoirs produits sur l’Afrique, loin des regards exogènes. Il reste l’une des œuvres majeures du courant postcolonial, appelant le continent à se libérer d’un narratif imposé.

Mudimbe n’était pas qu’un théoricien. Poète et romancier, il explorait également, dans Entre les eaux (1973) et L’Odeur du père (1982), les tensions identitaires entre tradition et modernité, foi et raison. Son style dense et pédagogique — reflet de son métier de professeur — mêlait l’intime et le politique, notamment dans ses écrits romanesques.

La disparition de Valentin-Yves Mudimbe survient alors que l’Afrique multiplie les initiatives pour reprendre la maîtrise de ses récits. Avec une industrie culturelle appelée à peser plusieurs milliards de dollars d’ici 2030, selon l’UNESCO, son héritage intellectuel apparaît plus pertinent que jamais.

Pourtant, le décès de celui qui voulait décoloniser les imaginaires africains afin d’affirmer l’avenir du continent est passé presque inaperçu.

Servan Ahougnon

Posted On mardi, 29 avril 2025 02:07 Written by

Des prévisons de croissance moins vigoureuses en Afrique subsaharienne malgré quelques bonnes surprises, les réformes à envisager face à un environnement global marqué par des changements de priorités chez les leaders mondiaux: Amadou Nicolas Racine Sy, économiste et conseiller du directeur dans le département Afrique du Fonds Monétaire International (FMI), où il travaille depuis plus de 24 ans, revient sur les perspectives économiques revisées d’avril 2025 pour l’Afrique subsaharienne.

Agence Ecofin : Le FMI a publié le 25 avril 2025, ses perspectives révisées pour l’Afrique subsaharienne et l’Afrique en général. Selon les premiers éléments de ces perspectives, la croissance en Afrique subsaharienne devrait atteindre 3,8 % en 2025 et 4,2 % en 2026. Bien que ces chiffres soient en dessous des prévisions d’octobre 2024, ils marquent une légère amélioration par rapport à 2023 et 2024. Pourquoi le FMI considère-t-il que cette croissance reste un défi, alors que dans d’autres régions du monde, la progression dans la création de richesses sera moins soutenue ?

Amadou Sy: Après quatre ans de chocs successifs, nous étions effectivement un peu plus optimistes pour 2025 et 2026. En 2024, le dernier trimestre a apporté de bonnes surprises dans plusieurs pays, ce qui nous a permis de réviser à la hausse nos prévisions pour cette année-là. Cependant, pour 2025, nous anticipons un ralentissement de la croissance régionale, principalement en raison de conditions mondiales turbulentes. En particulier, que l’incertitude autour des droits de douane américains entraîne une baisse de la demande extérieure globale. Nous avons dû réviser à la baisse les prévisions de croissance pour les principaux partenaires commerciaux de la région, comme la Chine et l’Union européenne.

« Enfin, nous observons un durcissement des conditions financières, avec une forte augmentation des spreads souverains pour les pays africains. »

Deuxièmement, nous prévoyons une baisse des prix des matières premières, notamment du pétrole. Cela pose problème pour les pays exportateurs de pétrole, même si les importateurs pourraient en bénéficier. Enfin, nous observons un durcissement des conditions financières, avec une forte augmentation des spreads souverains pour les pays africains. Ce ralentissement est problématique car il est inférieur au potentiel de croissance de la région, estimé entre 4 et 4,5 % en moyenne. Cela aggrave la pauvreté et complique la sortie du cycle de pauvreté pour les populations vulnérables. En termes de croissance par habitant, ce ralentissement freine la convergence vers les niveaux des pays plus riches, une convergence essentielle pour nos pays.

Agence Ecofin : Ces chiffres masquent des disparités, notamment pour les pays à faible revenu où l’on attend une croissance autour de 5,8 %, en décalage avec le ralentissement global. Pourriez-vous détailler quels pays seront les moteurs de cette croissance et ceux qui risquent de rencontrer des freins ?

Amadou Sy : Vous avez raison, malgré une dégradation moyenne, les performances varient considérablement. Onze des vingt économies mondiales à la croissance la plus rapide en 2025 sont en Afrique subsaharienne. En 2024, le Niger et le Rwanda ont affiché les taux de croissance les plus élevés de la région. D’autres pays, comme le Bénin, l’Éthiopie, la République démocratique du Congo, la Guinée, le Sénégal et l’Ouganda, ont enregistré des croissances supérieures à 6 %, principalement grâce à des économies diversifiées, sauf pour la RDC et, dans une moindre mesure, la Guinée.

« En 2024, le Niger et le Rwanda ont affiché les taux de croissance les plus élevés de la région. D’autres pays, comme le Bénin, l’Éthiopie, la République démocratique du Congo, la Guinée, le Sénégal et l’Ouganda, ont enregistré des croissances supérieures à 6 % ».

À l’inverse, les pays avec une croissance inférieure à 2 % incluent le Botswana, la République centrafricaine, le Tchad, la Guinée équatoriale, Sao Tomé-et-Principe, l’Afrique du Sud, le Soudan du Sud et le Zimbabwe. Les pays riches en ressources naturelles, notamment les exportateurs de pétrole, affichent une croissance faible. Cependant, il y a des signes positifs : le Nigeria, par exemple, a atteint 3,4 % de croissance en 2024, grâce à une production d’hydrocarbures plus élevée et un secteur des services dynamique. Cela montre qu’il faut analyser les performances pays par pays.

Agence Ecofin : Revenons à l’Afrique subsaharienne. Cette croissance semble insuffisante pour répondre aux besoins de près de 900 millions de personnes. De plus, elle manque d’inclusivité, comme le FMI le souligne souvent, avec des revenus nationaux bruts réduits par les déficits commerciaux, le remboursement de la dette et la rémunération des capitaux investis. Comment le FMI collabore-t-il avec les gouvernements pour préserver cette faible valeur ajoutée au sein des économies locales ?

Amadou Sy : La région a besoin d’une croissance plus rapide et inclusive pour améliorer le niveau de vie, et nous pensons que c’est réalisable. Le FMI travaille avec les gouvernements sur trois priorités. Premièrement, rétablir et soutenir la stabilité macroéconomique, une condition nécessaire. Dans des contextes d’inflation élevée ou de volatilité monétaire, les décisions économiques deviennent complexes. Cette stabilité doit être calibrée selon les déséquilibres et les contraintes politiques de chaque pays.

Deuxièmement, faire de la politique budgétaire un levier d’inclusion. Côté recettes, il y a une marge pour augmenter les recettes fiscales de manière équitable, en améliorant l’administration fiscale plutôt qu’en augmentant les taux d’imposition. Côté dépenses, il faut renforcer la protection sociale et les services publics, tout en hiérarchisant les investissements. Une stratégie budgétaire à moyen terme, soutenue par un cadre institutionnel solide, peut réduire les coûts économiques et sociaux des ajustements.

« Côté recettes, il y a une marge pour augmenter les recettes fiscales de manière équitable. Côté dépenses, il faut renforcer la protection sociale et les services publics. »

Troisièmement, accélérer les réformes structurelles pour une croissance durable et inclusive. Le secteur privé doit jouer un rôle moteur en améliorant le climat des affaires et la gouvernance. Pour les pays dépendants des ressources naturelles, comme l’Angola où 90 à 95 % des exportations reposent sur le pétrole, il faut lever les obstacles à la diversification. Ces réformes nécessitent une communication avec les parlements et la société civile pour garantir leur mise en œuvre.

Agence Ecofin : Le secteur extérieur impacte fortement les économies africaines. Après la Covid, la guerre en Ukraine, et maintenant les incertitudes liées à la présidence américaine, comment le FMI conseille-t-il les pays face à cette volatilité mondiale, au-delà des réformes internes ?

Amadou Sy : Nos économies sont très vulnérables aux chocs externes, sur lesquels les décideurs ont peu de contrôle. Nous conseillons de réduire les vulnérabilités macroéconomiques tout en répondant aux besoins de développement, dans un cadre socialement et politiquement acceptable. C’est un équilibre délicat. Il faut calibrer les politiques macroéconomiques et constituer des marges de manœuvre, comme des réserves budgétaires, même si cela est politiquement difficile. Comme l’a dit une ancienne directrice du FMI, « il faut réparer le toit quand le soleil brille ».

« Comme l’a dit une ancienne directrice du FMI, « il faut réparer le toit quand le soleil brille ».

Constituer ces coussins de sécurité, par exemple en limitant les dépenses lors de hausses temporaires des revenus pétroliers, est une assurance contre les chocs. Les gouvernements ne sont pas seuls : le FMI, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et d’autres partenaires jouent un rôle. Mais le secteur privé, y compris les PME, doit être mobilisé en réduisant les obstacles réglementaires. Face à une croissance démographique rapide et aux besoins des jeunes en éducation et santé, accélérer ces réformes est impératif.

Propos receuillis par Idriss Linge

Posted On samedi, 26 avril 2025 16:00 Written by

L’ingénieur minier sud-africain Jac Van Heerden a été nommé directeur général d’Alphamin Bisie Mining (ABM), filiale d’Alphamin Resources, qui exploite la plus grande mine d’étain de la République démocratique du Congo (RDC). L’annonce a été faite le 17 avril 2025 par la société minière. Il succédera à John Robertson, parti à la retraite, après approbation des autorités réglementaires.

« Alphamin se réjouit de pouvoir compter sur son leadership pour continuer à créer de la valeur durable au bénéfice de toutes les parties prenantes d’ABM », a déclaré la compagnie.

Âgé de 50 ans, Jac Van Heerden dispose de 25 années d’expérience dans le secteur minier africain, aussi bien dans l’exploitation de mines à ciel ouvert que souterraines, pour des métaux de base et précieux. Il est également reconnu pour son expertise en services techniques, en gestion générale et en direction exécutive.

Le nouveau directeur général connaît déjà le contexte congolais. Il a travaillé en RDC entre avril et décembre 2018, comme directeur général de la filiale locale d’Eurasian Resources Group Africa.

Défi sécuritaire

Ces compétences seront précieuses pour gérer la mine d’étain de Bisie, l’une des plus importantes au monde, située dans un environnement sécuritaire tendu. Les opérations sur le site ont tout juste repris le 15 avril, après une interruption forcée d’un mois liée à l’avancée du groupe rebelle M23.

La production avait été suspendue le 13 mars, lorsque les rebelles, soutenus par le Rwanda, s’étaient rapprochés à 172 kilomètres de la zone minière. Après s’être rapprochés à 60 kilomètres du site, ils se sont depuis retirés à environ 130 kilomètres à l’est. Mais la situation reste instable.

La sécurité constitue donc le défi immédiat pour Jac Van Heerden. Elle menace non seulement les opérations, mais aussi le personnel et la chaîne logistique. Cette instabilité a d’ailleurs conduit Alphamin à revoir ses objectifs annuels de production à la baisse, passant de 20 000 à 17 500 tonnes d’étain pour 2025.

Cette réduction affecte significativement les performances financières de l’entreprise. Au premier trimestre, le résultat d’exploitation a reculé de 19 %, atteignant 62 millions de dollars contre 76 millions au dernier trimestre 2024. L’entreprise dispose néanmoins actuellement de 99 millions de dollars de trésorerie, avec 38 millions de dollars supplémentaires attendus en recettes de ventes avant la fin avril 2025.

Mine stratégique

Le nouveau dirigeant devra aussi composer avec des tensions communautaires. Une enquête de Mongabay a révélé des conflits avec les communautés locales, notamment les Banamwesi et Motondo, qui accusent l’entreprise d’occuper leurs terres sans consultation préalable.

La mine de Bisie étant située dans une zone écologiquement sensible du bassin du Congo, la gestion des résidus miniers et le risque de contamination des eaux souterraines constituent un autre défi majeur.

Le complexe minier de Bisie représente à lui seul plus de 6 % de l’approvisionnement mondial en étain. Il comprend deux gisements de classe mondiale : Mpama North, avec une teneur d’environ 4,5 %, est le gisement d’étain le plus riche au monde — près de quatre fois la moyenne des autres mines — et Mpama South, avec une teneur d’environ 2 %, arrive en deuxième position à l’échelle mondiale.

Cette position stratégique fait d’Alphamin un acteur central du marché de l’étain, un métal essentiel pour l’électronique.

Georges Auréole Bamba

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Posted On dimanche, 20 avril 2025 17:11 Written by

Moins de cinq mois après avoir annoncé le lancement de ses activités en République démocratique du Congo (RDC), le pétrolier camerounais Tradex (Trading & Exploitation) estime déjà que sa filiale congolaise a besoin d’un nouvel élan. Pour ce faire, l’équipe dirigeante a été remaniée à l’occasion d’un conseil d’administration ordinaire tenu le 10 avril 2025 à Djibloho, en Guinée équatoriale.

Igor Emmanuel Soya Bissaya, élu président du conseil d’administration (PCA) lors de la première session du 26 novembre 2024 à Kinshasa, a été remplacé par Emmanuel Patrick Mvondo. Ce juriste camerounais faisait déjà partie des premiers administrateurs désignés lors de l’assemblée générale constitutive de la société. Il est surtout l’actuel directeur général de Tradex SA, actionnaire unique de la filiale congolaise.

À en croire ce dernier, la Société nationale des hydrocarbures (SNH), fondatrice du groupe Tradex, « attend de l’équipe que nous constituons qu’elle impulse une nouvelle dynamique à Tradex RDC, société emblématique de notre groupe, en ce qu’elle nous ouvre les portes de l’Afrique australe ». Et d’ajouter : « Notre priorité est donc de finaliser dans les plus brefs délais les formalités administratives, avec pour objectif un déploiement sur le terrain avant la fin du second semestre 2025 ».

Selon nos informations, jusqu’au début du mois de mars, la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC), banque centrale des six pays de la Cemac — à laquelle appartient le Cameroun — n’avait pas encore autorisé le transfert des 2,5 milliards de FCFA correspondant au capital social de la filiale. En RDC, le déploiement de Tradex doit également composer avec les lourdeurs administratives, régulièrement dénoncées par les autorités locales, ainsi qu’avec des défis logistiques et de ressources humaines. Le pays, vaste de plus de deux millions de kilomètres carrés, souffre en effet d’un déficit important d’infrastructures de transport et en capital humain.

Ces défis sont d’autant plus susceptibles de se poser que Tradex prévoit d’intervenir sur l’ensemble de la chaîne de valeur du secteur pétrolier aval. Selon l’entreprise, ses activités incluront la distribution de produits pétroliers via un réseau de stations-service et de points de consommation installés sur les sites industriels, l’avitaillement des aéronefs dans les aéroports congolais, ainsi que l’approvisionnement des navires et autres embarcations dans les eaux congolaises.

Néanmoins, dans la stratégie de développement de l’entreprise, le gaz domestique est perçu comme une niche. L’usage du gaz de pétrole liquéfié (GPL) reste encore limité dans le pays, avec seulement 14 % de taux de pénétration à Kinshasa, soit environ 250 000 ménages. Les autorités ambitionnent de porter ce chiffre à 1,2 million de ménages d’ici 2030, ce qui ouvre une marge de croissance considérable pour les opérateurs du secteur.

Pierre Mukoko

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Posted On vendredi, 11 avril 2025 14:11 Written by

Le président togolais Faure Gnassingbé est pressenti pour devenir le nouveau médiateur de l’Union africaine (UA) dans la crise persistante à l’est de la République démocratique du Congo (RDC). La proposition, formulée par le président angolais João Lourenço, président en exercice de l’UA, a été entérinée par le Bureau de l’Assemblée lors d’une réunion virtuelle tenue le 5 avril 2025.

Après avoir annoncé son retrait en tant que médiateur, comme l’indique un communiqué officiel de l’UA, le chef de l’État angolais a proposé Faure Gnassingbé pour lui succéder. Cette proposition a obtenu une réponse favorable du président togolais. Il ne reste plus qu’elle soit entériné par l’Assemblée des chefs d’État et de gouvernement.

La diplomatie togolaise a rapidement réagi à cette annonce. « Nous remercions le Bureau de l’Assemblée de l’Union africaine, et particulièrement le président Lourenço de l’Angola pour sa proposition, et confirmons la disponibilité du président Faure Gnassingbé à œuvrer pour la paix, la réconciliation et la stabilité dans l’est de la RDC », a déclaré Robert Dussey, ministre des Affaires étrangères du Togo, sur le réseau social X (anciennement Twitter).

Le Togo, sous la direction du président Faure Gnassingbé, s’est déjà illustré par son rôle dans la résolution de plusieurs crises en Afrique de l’Ouest. Grâce à sa médiation, 49 militaires ivoiriens détenus au Mali ont pu être libérés, évitant une escalade des tensions entre Abidjan et Bamako. Lomé a également contribué à apaiser les crispations régionales liées au retrait des pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Pour Lomé, ce rôle de médiation représente non seulement une nouvelle mission diplomatique d’envergure, mais aussi une consolidation supplémentaire de son statut géopolitique. Dans un contexte marqué par les tensions régionales, mais aussi par l’émergence de nouvelles alliances panafricaines, le Togo renforcerait sa position comme carrefour diplomatique, logistique et stratégique en Afrique de l’Ouest. Cette mission pourrait également générer des retombées concrètes en matière de coopération bilatérale et de sécurité frontalière.

Faure Gnassingbé devra toutefois composer avec la présence d’autres médiateurs, notamment le Qatar. Doha a récemment marqué des points sur la scène diplomatique en parvenant à organiser une rencontre entre les présidents Félix Tshisekedi (RDC) et Paul Kagame (Rwanda), le 18 mars 2025. Le Qatar a également réussi à réunir, à Doha, des représentants du gouvernement congolais et ceux de l’AFC/M23, avec l’ambition d’aboutir à un cessez-le-feu durable.

Ayi Renaud Dossavi, TogoFirst

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Posted On dimanche, 06 avril 2025 18:29 Written by

Un deal à un milliard de dollars a propulsé Jean-Pierre Latere sur le devant de la scène. Durant la semaine du 17 au 23 mars 2025, le Belge d’origine congolaise a fait la une des journaux. Lundi, EsoBiotec, l’entreprise qu’il a fondée en 2020 à Mont-Saint-Guibert, en Belgique, a annoncé la signature d’un accord définitif en vue de son acquisition par AstraZeneca. Le groupe britannique figure parmi le top 10 des plus grandes entreprises pharmaceutiques mondiales, avec un chiffre d’affaires de 54,1 milliards de dollars en 2024.

L’accord prévoit un premier versement immédiat de 425 millions de dollars, suivi de 575 millions supplémentaires, conditionnés aux résultats futurs de la jeune pousse.

AstraZeneca accepte de miser autant sur EsoBiotec en raison du potentiel de sa technologie révolutionnaire : la thérapie cellulaire in vivo imaginée par Jean-Pierre Latere. Elle devrait permettre de traiter le cancer par une simple injection, rendant ainsi les traitements plus rapides, moins coûteux, et donc accessibles à un plus grand nombre de patients.

Après plus de quatre ans de recherche, un premier patient a été injecté début décembre 2024. Au terme de près de 28 jours de test, les résultats publiés en janvier ont été qualifiés d’« exceptionnels », attirant l’attention des géants de la pharmacie. Deux mois plus tard, le deal avec AstraZeneca était conclu, projetant son fondateur sous les feux des projecteurs.

L’enfant de Lubumbashi

Ce succès résonne aussi en République démocratique du Congo (RDC), non seulement pour l’espoir qu’il suscite dans le traitement du cancer, mais aussi parce que Jean-Pierre Latere est un fils du pays. Le chimiste est né à Lubumbashi et a grandi à Kinshasa, où il a étudié au Collège Boboto. Cet établissement confessionnel est réputé dans le pays pour la qualité de sa formation.

En 1994, à l’âge de 18 ans, Latere s’envole pour la Belgique. Il y poursuit ses études supérieures à l’Université de Liège, où il décroche un doctorat en chimie des polymères, avant d’effectuer un post-doctorat à l’Université du Michigan, aux États-Unis.

À l’issue de son parcours académique, Jean-Pierre Latere entame sa carrière chez Johnson & Johnson, l’un des leaders mondiaux de la pharmacie et des dispositifs médicaux. Il y travaille au sein de la filiale Janssen, aux États-Unis puis en Belgique, dans le développement pharmaceutique et les technologies médicales. Le Congolais d’origine occupera par la suite plusieurs postes de direction, notamment chez Celyad Oncology, qu’il rejoint en janvier 2017.

C’est chez Celyad Oncology que Jean-Pierre Latere travaille pour la première fois sur les thérapies cellulaires. Cette approche consiste à prélever le sang du patient, à isoler certains globules blancs, puis à les modifier génétiquement en laboratoire afin de les rendre capables de reconnaître et d’éliminer les cellules cancéreuses, et à les réinjecter au patient. Mais cette méthode, bien que prometteuse, est coûteuse et s’étale sur plusieurs semaines.

Rendez-vous dans au plus six ans 

Touché personnellement par la maladie d’un proche, Latere décide de s’attaquer à ces limites. Son objectif : rendre la thérapie plus rapide et accessible au plus grand nombre. En 2020, il quitte Celyad et fonde EsoBiotec. Son idée est simple mais audacieuse : utiliser le corps du patient comme laboratoire. C’est ainsi qu’est née la thérapie cellulaire in vivo. Contrairement à la méthode classique, cette approche élimine plusieurs étapes (prélèvement sanguin, transport, manipulation en laboratoire), rendant le traitement à la fois plus rapide et moins coûteux.

Au cœur de cette innovation se trouve une plateforme développée par EsoBiotec : l’Engineered NanoBody Lentiviral (ENaBL, qui signifie « permettre » en français). Il s’agit d’un outil génétique aux applications potentielles multiples, capable de cibler différents types de cancers, et peut-être même certaines maladies auto-immunes.

Lorsqu’il se lance dans cette aventure, Jean-Pierre Latere, alors âgé de 45 ans, s’imagine parti pour vingt ans de travail… Mais une douzaine d’années pourrait suffire. Le premier produit est espéré sur le marché d’ici cinq à six ans.

Pierre Mukoko et Ronsard Luabeya, stagiaire

Posted On jeudi, 27 mars 2025 07:32 Written by

Au cours de la première semaine de mars 2025, une délégation du Fonds monétaire international (FMI) en provenance de Washington a séjourné à Kinshasa. En l’absence d’un communiqué de fin de mission, Bankable s’est rapproché du représentant résident du FMI en République Démocratique du Congo (RDC) afin d’en comprendre les enjeux.

En poste depuis octobre 2024, après six années passées au même poste au Mali, René Tapsoba a accepté de répondre à nos questions. L’économiste, passé également par la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), évoque l’impact de la crise sécuritaire sur la mise en œuvre du nouveau programme de la RDC avec le Fonds, ainsi que l’aide que l’institution de Bretton Woods est en mesure d’apporter à un pays qui, face à l’escalade du conflit à l’est, pourrait avoir un besoin accru de ressources en devises pour financer ses dépenses militaires.

Bankable : Au début du mois de mars, une mission du FMI s’est rendue en RDC. Depuis la validation du programme le 15 janvier, le pays a connu un choc interne marqué par l’intensification du conflit au Nord-Kivu et au Sud-Kivu. Dans ce contexte, quel état d’esprit avez-vous trouvé au sein de l’administration congolaise ?

René Tapsoba : Comme vous le soulignez, à peine deux semaines après l’approbation des deux programmes soutenus par le FMI, la RDC s’est retrouvée confrontée à une escalade des hostilités dans l’est du pays. Nous regrettons vivement cette détérioration de la situation sécuritaire, qui s’accompagne d’un drame humanitaire.

A la suite de notre directrice générale, qui a exprimé sa solidarité au ministre des Finances lors d’une récente rencontre à Washington, je tiens ici à réitérer notre compassion et notre soutien à toutes les populations durement éprouvées par cette violence. Nous espérons un retour rapide à la paix et à la sécurité, afin que la RDC puisse se concentrer sur l’essentiel : mobiliser ses ressources et son énergie à l’exploitation de son immense potentiel en vue de parvenir à un développement socio-économique plus harmonieux, mieux partagé et plus durable.

Cela dit, nous avons été très encouragés par la volonté réaffirmée du gouvernement de poursuivre la mise en œuvre des deux programmes, malgré un contexte plus difficile. Le ministre des Finances l’avait déjà assuré à la directrice générale à Washington et, au cours de la mission de la semaine dernière, notre équipe a pu constater cet esprit de résilience chez ses différents interlocuteurs dans les services techniques.

« Au cours de la mission de la semaine dernière, notre équipe a pu constater cet esprit de résilience chez ses différents interlocuteurs dans les services techniques. »

Nous avons perçu un intérêt renouvelé pour consolider les efforts de stabilisation macroéconomique et approfondir les réformes, malgré les défis croissants. Bien entendu, nos interlocuteurs ont également témoigné leur solidarité envers leurs compatriotes de l’Est.

Bankable : Les autorités se sont engagées à fournir une quarantaine d’indicateurs dans le cadre de la Facilité élargie de crédit, ainsi qu’une douzaine dans le cadre de la Facilité pour la résilience et la durabilité. Avez-vous obtenu toutes ces informations nécessaires pour la première revue ?

René Tapsoba : Avant tout, il convient de préciser que si les discussions dans le cadre de la mission formelle consacrée à la première revue du programme soutenu par la Facilité élargie de crédit sont provisoirement prévues pour avril, elles devront être suivies d’un processus de revue interne au FMI, avant la soumission du dossier au Conseil d’administration, probablement en fin juin ou plus tôt. Ce n’est donc qu’après l’approbation par le Conseil d’administration qu’un second décaissement au titre de la Facilité élargie de crédit pourrait intervenir, ce qui ne saurait se faire avant fin juin 2025.

Pour la Facilité pour la résilience et la durabilité, la première échéance est prévue pour octobre-novembre 2025. Si les réformes sont mises en œuvre dans les délais, cela pourra ouvrir la voie à un décaissement de deux tranches après approbation par le Conseil d’administration, prévu pour la fin décembre ou le début de janvier 2026.

Bankable : Ces précisions étant faites, pouvez-vous nous dire si vous avez reçu les informations attendues ?

René Tapsoba : Nos différents interlocuteurs au sein des services techniques ont fourni tous les efforts nécessaires pour les mettre à disposition les données et informations demandées. Les premières mesures ont déjà été mises en place pour garantir l’atteinte des réformes attendues dans les délais impartis.

« Les premières mesures ont déjà été mises en place pour garantir l’atteinte des réformes attendues dans les délais impartis. »

Pour la Facilité pour la résilience et la durabilité, les échéances sont relativement plus éloignées, ce qui laisse une certaine marge de manœuvre. S’agissant de la Facilité élargie de crédit, nous avons bien reçu les données initialement requises. Toutefois, compte tenu des implications macroéconomiques et budgétaires potentielles de l’escalade de la crise sécuritaire et de ses conséquences humanitaires, il sera nécessaire de collecter des données supplémentaires afin de réévaluer le cadrage macroéconomique en fonction de ces nouveaux développements.

Ce travail sera essentiel pour préparer, dans les meilleurs délais, la mission formelle dédiée à la première revue du programme prévue autour du mois d’avril. En résumé, toutes les données initialement demandées ont été obtenues, mais le nouveau contexte exige un complément d’information pour affiner l’analyse des implications macroéconomiques et budgétaires.

Bankable : Faut-il en conclure qu’un réexamen du programme aura lieu avant la première revue ?

René Tapsoba : Non, il ne s’agit pas d’un réexamen du programme, mais d’une réévaluation des implications macroéconomiques potentielles, car nous faisons face à un choc. Lorsqu’un tel événement survient, il est essentiel d’analyser ses répercussions sur plusieurs aspects : le secteur réel (croissance, inflation), la balance des paiements et la gestion des finances publiques.

« Non, il ne s’agit pas d’un réexamen du programme, mais d’une réévaluation des implications macroéconomiques potentielles, car nous faisons face à un choc. »

Nous devons également examiner les mesures prises par les autorités pour atténuer l’impact du choc et identifier la part des répercussions échappant à leur contrôle. En effet, malgré les actions internes mises en place, certaines conséquences ne peuvent être absorbées par des mesures de compensation. Il est donc crucial de procéder à une analyse rigoureuse de la situation. Pour cela, nous poursuivons nos discussions avec les autorités et avons demandé des données et informations supplémentaires.

Bankable : Est-ce la crise à l’est qui a provoqué un glissement du calendrier, repoussant à juin le deuxième décaissement qu’on croyait attendu en mai ?

René Tapsoba : Je tiens tout d’abord à préciser que le fait que le décaissement n’interviendra qu’après fin juin n’est pas lié à la crise sécuritaire. Il s’agit du calendrier normal. La mission se tient généralement à la fin avril ou au début mai. Une fois les discussions conclues, si elles sont satisfaisantes, un accord préliminaire au niveau des services est généralement annoncé à la mi-mai. Mais cette annonce ne donne pas immédiatement droit au décaissement. Il faut ensuite passer par le circuit interne de revue avant la soumission au Conseil d’administration, ce qui intervient généralement à la fin juin, voire parfois début juillet. Il est donc important de noter que ce processus est indépendant de l’escalade de la crise sécuritaire.

Bankable : De nombreuses personnes s’interrogent sur le processus d’évaluation du FMI et la manière dont ses conclusions sont établies. Pourriez-vous expliquer comment le FMI détermine, à l’issue d’une revue, si un décaissement peut être effectué ou, au contraire, s’il doit être suspendu ?

René Tapsoba : L’évaluation de la performance repose sur plusieurs critères. D’un côté, il y a l’observance des critères quantitatifs. Dans le cas de la RDC, cela inclut, par exemple, le respect des engagements de la Banque centrale et le plafond d’endettement extérieur contracté par le gouvernement.

D’un autre côté, nous évaluons les progrès dans la mise en œuvre des réformes structurelles, notamment celles liées à la modernisation de la gestion des finances publiques. Pour le programme actuel, cela comprend, par exemple, l’adhésion à la chaîne de la dépense, la réduction des dépenses exécutées en procédure d’urgence et l’opérationnalisation de la Direction générale du Trésor, entre autres mesures.

Nous prenons également en compte les objectifs indicatifs. Bien qu’ils aient un poids juridique moindre que les critères quantitatifs ou les repères structurels, ils restent essentiels. Par exemple, en RDC, nous examinons le niveau minimal prévu pour certaines dépenses budgétaires prioritaires, notamment dans les secteurs sociaux tels que la santé, la protection sociale et l’humanitaire. L’objectif est de s’assurer que le programme soutenu par le FMI garantit une protection adéquate des segments les plus vulnérables de la population.

Bankable : Les chocs, comme la guerre à l’est, sont-ils pris en considération dans cette évaluation ?

René Tapsoba : Je tiens à souligner que nous ne sommes pas des robots au FMI. Nous évaluons attentivement les écarts de performance imputables à des chocs extérieurs qui échappent totalement au contrôle des autorités.

« Je tiens à souligner que nous ne sommes pas des robots au FMI. Nous évaluons attentivement les écarts de performance imputables à des chocs extérieurs qui échappent totalement au contrôle des autorités. »

Nous veillons à différencier ce qui peut être compensé par des mesures correctives et ce qui dépasse leur capacité d’intervention. C’est pourquoi nous demandons des données et des informations supplémentaires pour affiner notre analyse de la situation.

Bankable : Les ressources apportées par le FMI servent généralement à financer les déséquilibres liés à la capacité du pays à régler ses factures à l’international. Comment ces ressources sont-elles prises en compte dans le budget et dans l’économie du pays ?

René Tapsoba : Dans le programme précédent soutenu par la Facilité élargie de crédit, les ressources décaissées étaient exclusivement destinées à l’appui de la balance des paiements. Comme vous l’indiquez, elles servaient à renforcer les réserves internationales de la Banque centrale, afin d’assurer la capacité du pays à honorer ses obligations financières à l’international et à accroître sa résilience face aux chocs externes.

En revanche, dans le cadre du programme soutenu par la Facilité élargie de crédit, approuvé par le Conseil d’administration en janvier, il a été convenu, à la demande des autorités congolaises, qu’une partie des décaissements puisse être allouée au budget de l’État.

Cependant, cette allocation budgétaire est conditionnée à des progrès tangibles dans la modernisation de la gestion des finances publiques.

« Cependant, cette allocation budgétaire est conditionnée à des progrès tangibles dans la modernisation de la gestion des finances publiques. »

Si ces avancées sont constatées dans les mois à venir, alors, en plus du renforcement des réserves internationales, une partie des décaissements pourrait être orientée vers le budget de l’État.

Bankable : Le prochain décaissement est estimé à 190,4 millions de droits de tirage spéciaux (DTS), soit un peu plus de 266,6 millions de dollars. Au regard de la dégradation de la situation sécuritaire à l’est du pays, qui entraîne une hausse des dépenses militaires en devises, peut-on s’attendre à ce qu’un décaissement plus important soit réalisé après la première revue ?

René Tapsoba : Nous continuons d’évaluer les conséquences budgétaires de la crise sécuritaire. Une fois cette analyse suffisamment avancée, les implications éventuelles en matière de paramétrage du programme, y compris les hypothèses de financement, pourront être discutées en interne au FMI.

L’appréciation de ces implications dépendra des mesures de compensation envisagées par les autorités ainsi que des appuis financiers mobilisables auprès des autres partenaires de développement. Dans ce genre de situation, nous privilégions ce que nous appelons un partage équitable de la charge financière. Cela signifie que, lorsqu’un besoin de financement additionnel se présente en raison d’un choc externe, le FMI ne peut pas être le seul à apporter son soutien.

Les autres partenaires, comme la Banque mondiale et les bailleurs bilatéraux, sont également appelés à contribuer, tandis que les autorités sont invitées à prendre des mesures d’ajustement en interne. Ce n’est qu’après avoir fait le point sur ces financements additionnels et les efforts internes que le FMI pourra discuter d’une éventuelle réévaluation de son soutien financier. Voilà ce que je peux dire à ce stade.

Bankable : Lors d’un Conseil des ministres, le gouvernement a indiqué qu’il prévoyait de discuter avec le FMI de la possibilité d’allouer une partie des ressources mises à sa disposition au financement des dépenses sociales des militaires engagés sur le front à l’est du pays. Avez-vous reçu une telle requête de la part des autorités ? Et si cette demande a été formulée, pensez-vous que le FMI pourrait y donner une suite favorable ?

René Tapsoba : Dans tous les pays, notre approche ne se focalise pas sur l’affectation spécifique des ressources à une ligne de dépenses particulière. Nos discussions portent sur le cadre macroéconomique global, l’équilibre budgétaire et les modalités de financement des éventuels déficits.

Lors de la mission de la semaine dernière, les autorités ne sont pas venues pour aborder spécifiquement la question du financement du soutien social aux forces de sécurité. Toutefois, elles ont évoqué certaines mesures budgétaires qu’elles envisagent, y compris celles que vous mentionnez.

Au FMI, nous n’accordons pas de financements dédiés à des projets spécifiques, contrairement à d’autres partenaires de développement. Nos interventions prennent la forme d’un soutien budgétaire général ou d’un appui aux réserves internationales. Les ressources allouées sont intégrées au budget de l’État, ce qui laisse au gouvernement une certaine flexibilité dans leur utilisation.

C’est pourquoi, lors de nos échanges avec les autorités, nous analysons les répercussions budgétaires globales et veillons à ce que l’exécution du budget 2025 tienne compte de ces nouveaux défis.

Bankable : M. Tapsoba, doit-on comprendre qu’une fois que le FMI accorde un appui budgétaire, les autorités congolaises disposent librement de ces fonds et peuvent les utiliser selon leurs propres priorités ?

René Tapsoba : Justement, c’est ce que j’ai tenté d’expliquer tantôt. Lors de nos missions, nous analysons les besoins de financement. Si un accord est conclu pour qu’une partie du soutien du FMI soit allouée au budget, alors ces ressources deviennent effectivement fongibles au sein du Trésor public. Cela signifie que le gouvernement peut les utiliser dans l’exécution de son budget, en fonction des priorités qu’il aura définies en amont. Ces priorités auront toutefois été discutées avec le FMI dans le cadre du programme.

Bankable : C’est ce qui s’est passé dans le cadre du Programme de développement local des 145 territoires (PDL 145) ?

René Tapsoba : Ce ne sont pas les décaissements au titre de la Facilité élargie de crédit qui ont servi à financer le PDL 145. Si vous vous souvenez, en 2021, le FMI avait alloué des DTS de manière exceptionnelle à tous les pays membres pour les aider à faire face aux répercussions de la Covid-19. Dans ce cadre, la RDC avait reçu 1,5 milliard de dollars en DTS. Il avait été convenu que la moitié de cette allocation serait utilisée pour renforcer les réserves internationales de la Banque centrale, tandis que l’autre moitié serait allouée au budget, en raison des difficultés financières du pays à cette période.

« Ce ne sont pas les décaissements au titre de la Facilité élargie de crédit qui ont servi à financer le PDL 145. »

C’est le gouvernement, en toute souveraineté, qui a décidé d’affecter 511 millions de dollars, issus de cette deuxième tranche, au financement du PDL 145. Ainsi, pour être clair : les ressources issues du programme précédent soutenu par la Facilité élargie de crédit n’ont pas servi à financer le PDL 145. La confusion vient probablement du fait que le montant du programme précédent était similaire à celui de l’allocation exceptionnelle des DTS.

Bankable : Plus de 90 % des dépôts bancaires en RDC sont constitués en dollars américains, malgré les efforts de la Banque centrale et des autorités pour dédollariser l’économie. Comment le programme avec le FMI prend-il en compte cette situation ?

René Tapsoba : La dédollarisation est un processus qui ne se décrète pas, mais qui se construit progressivement. La clé du succès réside dans la restauration de la confiance des agents économiques dans la monnaie nationale.

L’expérience internationale montre qu’il s’agit d’un processus de long terme, dont l’épine dorsale repose sur l’ancrage durable de la crédibilité des politiques économiques. Les programmes soutenus par le FMI, qu’il s’agisse du programme précédent ou de l’actuel programme avec la Facilité élargie de crédit, visent à jeter des bases solides pour renforcer la stabilité macroéconomique. Cela passe par l’amélioration de la crédibilité des politiques monétaires et budgétaires, un meilleur alignement entre la politique monétaire et la politique budgétaire, ainsi que la diversification de l’économie.

« La dédollarisation est un processus qui ne se décrète pas, mais qui se construit progressivement. La clé du succès réside dans la restauration de la confiance des agents économiques dans la monnaie nationale. »

La coordination entre ces différentes politiques est essentielle pour restaurer la confiance dans la monnaie nationale. La stratégie des autorités congolaises s’inscrit dans cette logique. Cependant, comme dans tout processus de dédollarisation, il faut du temps, de la patience et une mise en œuvre cohérente des réformes. Une fois ces prérequis bien ancrés, la dollarisation pourra être progressivement réduite, à mesure que la crédibilité retrouvée de la monnaie nationale s’affirme.

Les maîtres mots ici sont : crédibilité, confiance, patience et persévérance. Sans cela, toute tentative de dédollarisation risque d’être contre-productive. Avec les réformes en cours et le soutien du FMI, les autorités congolaises avancent dans la bonne direction pour poser les fondations solides nécessaires à la réduction durable de la dollarisation.

Interview réalisée par Idriss Linge et Aboudi Ottou

 

Posted On dimanche, 16 mars 2025 18:40 Written by

Sofibanque a annoncé, le 4 mars 2025, la nomination de Bobo Makunda Sefekese en tant que directeur général adjoint (DGA). Il occupera un second poste de DGA, nouvellement créé par la banque. Louis-Odilon Alaguillaume, en poste depuis avril 2022, conserve ses fonctions. Toutefois, selon la direction de Sofibanque, c’est Bobo Makunda Sefekese qui sera chargé de la mise en œuvre du plan de continuité des activités de la banque.

Approuvé par le conseil d’administration le 9 octobre 2023, ce plan vise à garantir la disponibilité des produits et services essentiels en cas de crise, qu’elle soit endogène ou exogène. Il s’accompagne d’un dispositif de secours informatique définissant les stratégies à adopter pour assurer la continuité technique et opérationnelle en situation de crise majeure. Ce dispositif relève également de la supervision du nouveau directeur général adjoint.

La nomination de Bobo Makunda Sefekese à ce poste prend ainsi tout son sens. Son profil correspond aux enjeux stratégiques liés à la continuité des activités. Titulaire d’une maîtrise en informatique de l’Université de Namur et d’un master en gestion des risques financiers de l’Université Saint-Louis de Bruxelles, il dispose des compétences nécessaires pour piloter ce plan. Fort de plus de 20 ans d’expérience dans les secteurs bancaire et assurantiel, en Belgique comme en RDC, il a notamment occupé les fonctions de directeur des systèmes d’information à Equity BCDC et de directeur organisation et informatique à la Banque commerciale du Congo.

Dans ses nouvelles fonctions, Bobo Makunda Sefekese travaillera aux côtés de Henry Yoan Wazne, administrateur directeur général (ADG) de Sofibanque depuis 2012. Selon le rapport 2023 de la banque, le(s) DGA assiste(nt) l’ADG au sein du comité de direction, organe chargé de préparer les décisions stratégiques du conseil d’administration et d’en assurer la mise en œuvre. Il(s) participe(nt) ainsi à la supervision des opérations, à l’optimisation des processus ainsi qu’à l’exécution des projets de développement de la banque. L’expertise de Bobo Makunda Sefekese en transformation digitale devrait notamment être mise à profit face à l’essor des fintechs et à la numérisation croissante des services bancaires.

En 2023, la Sofibanque occupait la 6e position du marché bancaire en République Démocratique du Congo avec un total bilan de 964 millions de dollars.

Boaz Kabeya, stagiaire

Posted On mardi, 11 mars 2025 15:18 Written by

Isabelle Lessedjina a tapé dans l’œil de Forbes Afrique. Elle figure en effet parmi les 50 femmes les « plus inspirantes du moment », selon la sélection établi par l’édition francophone du magazine économique américain Forbes, publié dans son hors-série de mars 2025, mois traditionnellement dédié aux femmes.

Depuis juillet 2024, Isabelle Lessedjina occupe le poste de présidente du conseil d’administration de Rawbank, la première banque en République Démocratique du Congo (RDC), le plus grand pays d’Afrique francophone. En 2023, cette banque affichait un total bilan de 4,813 milliards de dollars, soit 28 % de part de marché. Selon Forbes, cette nomination la place parmi les personnalités féminines influentes ayant un impact actif sur leur secteur.

Pour la Rawbank, la présence d’Isabelle Lessedjina dans cette sélection constitue une reconnaissance de son leadership. Elle « contribue à inspirer les rawbankers et plus largement les Congolais », précise la banque dans un post sur LinkedIn.

Le parcours d’Isabelle Lessedjina reflète son expertise et son leadership reconnus dans le monde économique et financier. Elle a occupé plusieurs postes importants, notamment dans le secteur bancaire et aérien, avant d’être portée à la présidence du conseil d’administration de Rawbank en juillet 2024.

Avec plus de 25 ans d’expérience, elle a commencé sa carrière comme trésorière chez Virgin Express en Belgique, avant de rejoindre Besins Healthcare Group au même poste en 2003. Son parcours l’a ensuite conduite à assumer diverses responsabilités stratégiques au sein de grandes institutions telles que Standard Chartered Bank, GE Capital Aviation Services (GECAS), ESSA Ltd, et Philips.

Depuis 2019, elle est la première vice-présidente de The Currency Exchange Fund (TCX), un fonds alternatif de développement. Elle dirige par ailleurs, depuis 2021, la société belge Aniz, spécialisée en services et conseils pour entreprise.

Diplômée de l’Institut d’études supérieures de commerce (IESE Business School) en Espagne, ainsi que de la London Business School, elle détient également un master en gestion des risques financiers et une licence en gestion de l’Université catholique de Louvain, en Belgique. Grâce à ces solides formations académiques, elle a développé une expertise pointue dans les domaines de la finance, de la gestion des risques et du leadership stratégique.

Timothée Manoke, stagiaire

Posted On dimanche, 09 mars 2025 12:14 Written by

En raison de la détérioration de la situation sécuritaire dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), 2 594 écoles ont cessé leurs activités dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, privant plus d’un million d’élèves d’accès à l’éducation, selon le compte rendu du Conseil des ministres du 28 février 2025. Aucune donnée n’a été communiquée concernant l’impact sur l’enseignement supérieur et universitaire.

Pour assurer la continuité des cours, le gouvernement congolais a décidé d’adopter, le 6 février dernier, l’enseignement ouvert et à distance dans les universités publiques et privées, offrant ainsi une nouvelle perspective à Schoolap, la plateforme d’apprentissage en ligne fondée en 2017 par Pascal Kanik.

Cette année-là, cet ancien employé de Vodacom a choisi d’abandonner un poste confortable pour se lancer dans l’entrepreneuriat. Avec son associé Guy-José Leta, il cofonde alors Schoolap, une solution numérique visant à améliorer l’accès à l’éducation en RDC.

Schoolap permet de connecter enseignants, parents et élèves à du contenu pédagogique certifié, garantissant ainsi un apprentissage de qualité. Aujourd’hui, près d’un million d’élèves à travers le pays bénéficient de cette solution, qui s’intègre désormais dans la stratégie éducative nationale.

L’idée de Schoolap germe alors que Pascal Kanik effectue une mission en province pour installer un réseau de télécommunications, suivie d’une sensibilisation sur le développement durable. Confronté aux défis du système éducatif congolais, il prend conscience de l’urgence de créer un outil moderne pour pallier le manque de ressources pédagogiques.

Booster par le Covid-19

En quelques années seulement, Pascal Kanik et son équipe ont fait de Schoolap une référence de l’edtech en RDC. En 2019, la startup réalise la plus grande levée de fonds d’Afrique centrale, obtenant 500 000 dollars américains pour accélérer sa croissance. Ce financement, apporté par le groupe international Eutelsat, est officialisé par la signature d’un contrat entre Pascal Kanik, CEO de Schoolap, et Jonathan Jansen, CEO de Flash International, dans les locaux d’Ingenious City.

La même année, la startup est récompensée lors des Seedstars, un concours dédié aux entreprises innovantes sur les marchés émergents, en remportant le prix de la meilleure plateforme d’éducation en ligne.

Le succès de Schoolap s’accélère avec la fermeture des écoles due à la pandémie de Covid-19. La plateforme devient alors une solution incontournable pour assurer la continuité pédagogique en RDC. Aujourd’hui, elle recense plus de 20 300 contenus pédagogiques, 6 000 écoles partenaires, 1,9 million d’élèves inscrits et 105 000 enseignants impliqués. Présente dans six provinces du pays, elle propose désormais sept produits intégrés à son offre éducative.

Après avoir conquis une large part du marché congolais, Schoolap franchit un nouveau cap en s’implantant au Kenya, marquant ainsi sa première expansion en Afrique anglophone. La startup propose une plateforme complète, combinant la gestion numérique des programmes scolaires et des outils interactifs, répondant aux besoins croissants des établissements éducatifs.

Ronsard Luabeya, stagiaire

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Posted On mardi, 04 mars 2025 13:47 Written by
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