Lors d’une visite le 17 septembre 2024 à Lufu, une localité de la province du Kongo Central réputée depuis des décennies pour son rôle clé dans le commerce des biens et services dans l’ouest de la République Démocratique du Congo, le ministre du Commerce extérieur, Julien Paluku, a promis de lutter contre certaines pratiques commerciales aux frontières. Selon lui, ces pratiques font perdre au pays 5 milliards de dollars par an.
Dans sa communication, le ministre n’a pas précisé la nature exacte des pertes évoquées. On ignore s’il s’agit de pertes fiscales, douanières, ou simplement de ressources en devises ou en épargne qui auraient pu être utilisées pour le développement de la RDC. Quoi qu’il en soit, la somme annoncée dépasse les recettes du secteur minier, selon les rapports de l’ITIE, et représente près du tiers du budget de l’année 2024.
Julien Paluku a énuméré les pratiques incriminées : « Il s’agit, entre autres, des transbordements de marchandises avec changement de destination, du fractionnement des marchandises en transit dans les pays voisins, de la minoration des valeurs et de la dénaturation des marchandises ». Selon lui, ces pratiques sont facilitées par des complicités « internes avérées », notamment celles qui évitent l’utilisation de la fiche électronique des renseignements à l’importation. Il a également pointé du doigt « certaines administrations douanières des pays voisins ».
Néanmoins, dans un pays qui continue d’améliorer son processus d’identification administrative des personnes, il demeure difficile de constituer un fichier complet des acteurs et de les gérer efficacement. Dans l’immédiat, le ministre Julien Paluku a annoncé la construction d’un laboratoire de contrôle pour certifier les produits entrant en RDC, notamment en provenance de l’Angola.
Kongo Central 17 septembre 2024.
— JULIEN PALUKU (@julienpalukucom) September 17, 2024
A #LUFU, frontière avec L'#ANGOLA, j'ai été on ne peut plus claire sur les pratiques qui nous font perdre 5 milliards USD chaque année en complicité avec certaines administrations douanières des pays voisins à la #RDC.
Il s'agit entre autres des… pic.twitter.com/FjUUoKn9yd
Julien Paluku connaît bien Lufu, dont il a été l’administrateur pendant cinq ans (de 1998 à 2003). Devenue, au fil du temps, un véritable supermarché géant, cette localité a gagné en importance pour plusieurs raisons. Située à proximité de l’Angola, elle permet, dans une certaine mesure, d’approvisionner la partie nord-ouest du pays en divers biens de consommation.
Cependant, avec la baisse de performance annuelle du port de Matadi, l’approvisionnement par ce point est devenu plus coûteux et complexe. Il est désormais plus rapide de s’approvisionner à partir du port de Luanda, en Angola, situé à environ 576 kilomètres par route. La qualité de la route permet une arrivée à Kinshasa plus rapide pour des coûts plus faibles.
Les défis de Lufu et de son marché sont bien connus. Cependant, d’un point de vue commercial, cette localité incarne parfaitement la recherche de rendements maximaux. Un exemple symbolique des risques que les produits vendus sur ce marché représentent pour la RDC est celui du ciment. Celui acheté à Lufu est plus compétitif que la production locale. Dans un pays où le PIB par habitant, bien qu’ayant doublé ces dernières années, ne s’élève qu’à 680 dollars par an, un écart de deux dollars sur un matériau de construction peut faire une réelle différence.
Georges Auréole Bamba
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