Alphamin Resources a annoncé, le 9 avril 2025, la reprise progressive de ses activités de production sur la mine d’étain de Bisie, située dans la province du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC). Dans un communiqué, l’entreprise indique que cette décision fait suite au retrait des « groupes armés » dans la zone.
Il y a quelques jours, les rebelles du M23 et leurs soutiens rwandais se sont déplacés de la cité de Walikale, située à 48 kilomètres de la mine, vers Nyabiondo et Masisi, soit à plus de 130 kilomètres à l’est du site minier.
Estimant que la sécurité de ses employés et sous-traitants n’était plus garantie, Alphamin avait décidé, un mois plus tôt, de suspendre temporairement ses opérations à Bisie. À l’époque, les rebelles se trouvaient à Kashebere, à 172 kilomètres du site.
La reprise des opérations intervient donc alors que les groupes armés sont plus proches de la mine, ce qui suggère que d’autres facteurs ont pu influencer la décision de l’entreprise.
Intérêts américains
On peut désormais affirmer que la relance des activités d’Alphamin à Bisie a été encouragée par le gouvernement américain. « C’était très triste de les voir suspendre leurs opérations… Nous les encourageons définitivement à reprendre leurs opérations », a déclaré Massad Boulos, conseiller principal pour l’Afrique du président Donald Trump, lors d’une conférence de presse tenue le 9 avril à Kigali, au Rwanda.
Massad Boulos achevait alors une visite de plusieurs jours dans la région des Grands Lacs. Selon le département d’État américain, cette mission visait à « favoriser les efforts en vue d’une paix durable dans l’est de la RDC » et à « promouvoir les investissements du secteur privé américain dans la région ».
Dans le contexte mondial de compétition pour l’accès aux métaux critiques, la mine d’étain de Bisie, qui a fourni plus de 6 % de l’offre mondiale en 2024, représente un enjeu stratégique pour les intérêts américains. Alphamin Resources, qui exploite ce site, est détenue à 57 % par Denham Capital, un fonds d’investissement fondé en 2004 et basé dans le Massachusetts, aux États-Unis.
Par ailleurs, Gerald Metals, négociant de métaux et matières premières associé, reste jusqu’en 2028 l’acheteur exclusif de la production d’étain de Bisie, conformément à un accord initialement conclu en 2018 et renouvelé en janvier 2024. Fondée en 1962 aux États-Unis, cette entreprise commercialise l’intégralité de la production de Bisie, principalement destinée aux industries de haute technologie.
Marché sous tension
Durant la suspension temporaire de ses opérations en RDC, Alphamin Resources a continué d’alimenter le marché, grâce à une production de 4 270 tonnes enregistrée au premier trimestre 2025. Mais une interruption prolongée aurait risqué de réduire l’offre mondiale d’étain, surtout que les récents tremblements de terre au Myanmar — pays qui fournit environ 10 % de l’offre mondiale d’étain — ont également perturbé la production.
C’est pourquoi la reprise des activités a été saluée par l’Association internationale de l’étain (ITA), qui estime qu’elle devrait permettre d’éviter la forte tension redoutée au deuxième trimestre sur ce marché.
Avec l’annonce de la reprise des activités d’Alphamin Resources en RDC, le cours de la matière première a d’ailleurs reculé : la tonne d’étain s’échangeait à 33 650 dollars à la Bourse de Londres, contre 34 930 dollars lors de l’annonce de la fermeture de la mine de Bisie. La tonne est projetée à 29 550 dollars dans trois mois.
Malgré la suspension de ses activités en mars, l’action d’Alphamin a enregistré une hausse de plus de 27 % depuis le 13 mars, pour clôturer à 0,77 dollar canadien le 9 avril 2025 à la Bourse de Toronto.
Pierre Mukoko et Timothée Manoke, stagiaire
Lire aussi :
Étain : Alphamin suspend sa production face à l’avancée du M23, les prix en hausse
Lithium de Manono : terrain favorable à Jeff Bezos et Bill Gates