La République démocratique du Congo est porteuse d’un projet dans le secteur énergétique, dénommé Compact Énergétique National. On l’a appris à l’issue du conseil des ministres du 8 novembre 2024. D’après le compte rendu de cette réunion, ce projet vise à augmenter le taux d’accès à l’électricité du pays de 21,5 % à 62,5 % d’ici 2030, en accélérant le rythme annuel d’électrification de 1 % actuellement à plus de 6 %.
Selon le ministre des Ressources hydrauliques et de l’Électricité, Teddy Lwamba, qui a présenté le projet en conseil des ministres, un investissement global de 36 milliards de dollars, ciblant les infrastructures de production, de transport et de distribution, est nécessaire pour atteindre cet objectif. De cette enveloppe, Teddy Lwamba estime la part de l’État à 16,5 milliards de dollars et celle du secteur privé à 19,5 milliards de dollars.
Le compte rendu du conseil des ministres ne dévoile pas la stratégie que le pays compte mettre en œuvre pour attirer un tel volume en six ans. Il est néanmoins clair qu’il s’agit d’un vrai défi, car il ressort des consultations effectuées en 2022 dans la perspective de l’élaboration d’une politique nationale de l’énergie que la mobilisation des ressources financières nécessaires au développement du secteur de l’électricité est limitée par « la non -attractivité » des investissements privés. En cause : « l’absence d’une politique nationale d’énergie déclinant une vision claire, des objectifs et des axes stratégiques », peut-on lire dans le rapport rendu public, le 7 octobre 2022, par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).
Depuis juin 2014, la RDC s’est dotée d’une loi qui a libéralisé le secteur de l’électricité. Ce texte a été complété en décembre 2018 par une autre loi, mais les experts estiment que ce cadre présente encore des limites. Le rapport cite notamment la mauvaise interprétation et les chevauchements dans l’exercice des prérogatives des structures du secteur de l’électricité, la lenteur dans le déploiement de l’Autorité de régulation du secteur de l’électricité (ARE) et de l’Agence nationale de l’électrification et des services énergétiques en milieux rural et périurbain (ANSER), ainsi que dans la mise en place des mesures réglementaires telles que le code réseau et la gestion du dispatching (interconnexion) ; ou encore la faible vulgarisation et diffusion de la loi relative à l’électricité et de ses mesures d’application.
Pour améliorer l’attractivité du secteur, le rapport recommande la mise en place de cadres réglementaires pour la gestion des ressources d’énergies primaires, notamment les cours d’eau, les hydrocarbures, la biomasse et la géothermie ; l’établissement de procédures claires et simplifiées pour favoriser la réalisation d’infrastructures d’énergies renouvelables, y compris des mesures permettant aux particuliers de vendre leur surplus d’énergie renouvelable à des tiers (réseaux ou consommateurs directs) ; le renforcement des mécanismes financiers, y compris la fiscalité, pour faciliter l’accès aux services énergétiques basés sur les énergies renouvelables ; la révision du cadre légal pour encourager la démocratisation et la compétitivité à travers les réseaux de transport plutôt que la concession exclusive dans la distribution ; ainsi que l’intégration de clauses de nullité pour toute concession accordée à un développeur incapable de satisfaire les besoins exprimés dans son périmètre concédé. Deux ans plus tard, plusieurs de ces constats et recommandations restent d’actualité.
Pierre Mukoko
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