Le président Félix Tshisekedi a invité, le 29 janvier 2025, les acteurs du secteur public et privé de la République Démocratique du Congo (RDC) à contribuer à l’effort de guerre pour soutenir les forces armées du pays, engagées dans les combats contre l’agression dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, qui a gagné en intensité ces dernières semaines. « Nos soldats se battent avec héroïsme pour la défense de notre intégrité territoriale et de notre souveraineté. Ils ont besoin de notre soutien total, qu’il soit moral, matériel ou logistique », a-t-il déclaré.
Dans ce discours, le premier à la nation depuis l’intensification des combats le 23 janvier dernier, le chef de l’État a indiqué avoir instruit le gouvernement de mettre en place des mesures rigoureuses de réduction du train de vie des institutions et de leurs animateurs. Au secteur privé, il a demandé une contribution active à cette cause commune.
Cet appel à l’effort collectif marque l’entrée de la RDC dans une économie de crise, alors que le pays prévoyait de consolider les acquis d’une amélioration du cadre macroéconomique avec un deuxième programme conclu avec le Fonds monétaire international (FMI). Dans ce cadre, le gouvernement s’est engagé à améliorer les recettes et à rationaliser les dépenses. Il est, par exemple, prévu de réduire les dépenses par procédures exceptionnelles à moins de 8 % des dépenses totales d’ici fin 2025. Or, en 2023, dans un contexte moins tendu, les seules dépenses exceptionnelles de sécurité se sont élevées à 1,4 milliard de dollars, soit 11,5 % du budget global de l’État, selon un rapport du FMI.
Vers une hausse de dépenses de sécurité
Les implications d’un réaménagement des dépenses restent à déterminer. Sur la base de la loi de finances adoptée pour l’année 2025, le gouvernement s’est ménagé des marges budgétaires. Il pourra ainsi solliciter la ligne 78, réservée aux « équipements divers », dont les prévisions d’engagement s’élèvent à 11 102 milliards de francs congolais (3,8 milliards de dollars). La rubrique 63 des interventions de l’État offre une flexibilité supplémentaire avec une disponibilité d’engagements de l’ordre de 4 649 milliards de francs congolais.
La réorientation annoncée des prévisions de dépenses entraînera de fait une contribution passive du secteur privé, notamment celui en relation avec la commande publique. Les acteurs concernés verront leurs parts dans le budget être réduites au profit de l’effort de guerre qui devrait surtout bénéficier aux entreprises exportatrices d’armes et autres munitions. Quant à la contribution active des entreprises, le gouvernement semble laisser à chacune le soin de définir l’action la plus appropriée.
La réorientation annoncée des prévisions de dépenses entraînera de fait une contribution passive du secteur privé local, notamment pour les entreprises qui sollicitent la commande publique. Les acteurs concernés verront leur part du budget réduite au profit de l’effort de guerre, qui devrait surtout bénéficier aux entreprises étrangères exportatrices d’armes et autres munitions. Quant à la contribution active des entreprises, le gouvernement semble laisser à chacune le soin de définir l’action la plus appropriée.
Pour l’instant, les réactions de la communauté internationale restent au stade de l’indignation, de la condamnation des agresseurs que sont le Rwanda et le M23, ou des appels au dialogue et au respect du droit international. Si l’Union européenne a annoncé une aide de 60 millions d’euros, on attend toujours des annonces de financements supplémentaires, notamment de la part de la Chine, dont les entreprises sont les principales bénéficiaires des contrats miniers en RDC. La gestion de la crise du Mpox n’apporte pas plus d’optimisme : le pays attend toujours les promesses d’aide financière de la communauté internationale, qui tardent encore à se concrétiser.
Georges Auréole Bamba
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