L’Africa-US Business Council, basé à New York, fait actuellement du lobbying auprès de l’administration américaine pour organiser une rencontre entre le président de la République Démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi, et le président américain Donald Trump.
Dans une lettre adressée le 21 février 2025 à Marco Rubio, secrétaire d’État des États-Unis, l’organisation estime qu’un tel échange pourrait poser « la base d’une coopération à long terme, garantissant que les États-Unis jouent un rôle majeur dans l’accès aux minéraux critiques nécessaires à leurs intérêts économiques et à leur sécurité nationale future ».
Cette initiative n’a, pour l’instant, suscité aucun commentaire officiel de la part des autorités congolaises. Toutefois, les responsables du lobbying affirment agir pour le compte du sénateur Pierre Kanda Kalambayi, président de la commission Défense, sécurité et protection des frontières au Sénat, et membre du parti du président Tshisekedi.
Selon la presse, le président congolais chercherait à conclure un accord minier avec les États-Unis afin d’obtenir leur soutien dans le conflit qui l’oppose aux rebelles du M23, soutenus par le Rwanda. Cette hypothèse a été avancée notamment à la suite d’une interview accordée par Félix Tshisekedi au New York Times en février.
Le Président Félix Tshisekedi invite plutôt les #USA dont les entreprises s'approvisionnent en matières premières stratégiques auprès du Rwanda qui les pillent en massacrant nos populations, de venir directement les acheter chez nous qui en sommes les véritables propriétaires pic.twitter.com/l8URuIOqcL
— Tina Salama (@TinaSalama2) February 23, 2025
En réaction, Tina Salama, porte-parole du chef de l’État, a déclaré sur X : « Le président Félix Tshisekedi invite plutôt les USA (États-Unis), dont les entreprises s’approvisionnent en matières premières stratégiques auprès du Rwanda qui les pillent en massacrant nos populations, à venir directement les acheter chez nous, qui en sommes les véritables propriétaires ».
La question de l’échange sécurité contre accès aux ressources minières est au cœur des stratégies américaines, notamment dans le contexte de la guerre en Ukraine, où l’approvisionnement en minerais critiques constitue un enjeu majeur. Néanmoins, il reste difficile de prévoir quelle réponse l’administration américaine apportera à cette proposition de coopération avancée avec la RDC.
Historiquement, la RDC a toujours occupé une place clé dans la diplomatie américaine en Afrique, particulièrement en matière d’aide et de coopération au développement. Le pays se distingue aussi par son système monétaire, où le dollar représente jusqu’à 92 % des dépôts bancaires, selon la Banque centrale du Congo.
Avant de quitter ses fonctions, le président Joe Biden avait effectué une visite sur le corridor ferroviaire de Lobito, un projet stratégique visant à faciliter l’exportation des minerais de la RDC vers les États-Unis. Ce corridor, qui relie la région minière du Katanga aux ports de l’Atlantique, est perçu comme un levier essentiel pour renforcer les liens économiques entre Washington et Kinshasa.
Proposition délicate
Un accord de principe existe déjà pour l’approvisionnement des États-Unis en minéraux critiques, à l’instar de ceux conclus avec l’Union européenne et l’Arabie saoudite, des partenaires dotés de capacités financières conséquentes. Cependant, sur le terrain, la Chine domine la chaîne de valeur avec plus de 80 % de participations, ce qui complexifie toute tentative de rééquilibrage du marché.
Dans son courrier, l’Africa-US Business Council évoque la possibilité de remplacer les troupes onusiennes présentes en RDC par des forces américaines. Une proposition qui, si elle venait à être sérieusement envisagée, pourrait susciter un débat aux États-Unis, en RDC et au sein de la sous-région.
Face à l’escalade de la violence dans l’est du pays et à l’occupation de Goma et Bukavu par les rebelles du M23, la communauté internationale a multiplié les condamnations contre le Rwanda. Plusieurs pays occidentaux ont même pris des sanctions contre Kigali. Toutefois, aucune assistance militaire directe n’a, à ce jour, été officiellement proposée à Kinshasa.
Georges Auréole Bamba
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