Déjà affectée depuis janvier par une recrudescence de l’insécurité, l’usine de thé de Lemera, située dans le territoire de Kalehe (Sud-Kivu), a subi un nouveau coup dur. Selon la presse locale, ses équipements de production ont été pillés le 6 juin 2025 par des éléments du M23, qui contrôlent plusieurs localités de la région avec le soutien de l’armée rwandaise. L’ensemble des machines, y compris les équipements agricoles et industriels, aurait été emporté vers une destination inconnue, affirme Radio Okapi. Cette attaque a entraîné l’arrêt complet des activités.
Héritée de l’époque coloniale, cette usine transformait les feuilles de thé en produit fini destiné au marché locale et à l’exportation. Elle représentait un pilier économique pour les territoires de Kalehe et Kabare-Kabamba, où près d’une centaine de familles dépendaient directement de son fonctionnement. L’unité disposait d’engins spécialisés pour l’entretien des plantations et offrait un débouché stable aux producteurs locaux. Son arrêt prive désormais de nombreux petits exploitants de revenus.
Cette fermeture intervient dans un contexte de crise généralisée dans la filière théicole des provinces du Nord et du Sud-Kivu, toutes deux lourdement affectées par l’insécurité. Au Nord-Kivu, par exemple, les Jardins Théicoles de Ngeri (JTN), autrefois florissants à l’époque coloniale, sont aujourd’hui à l’abandon. Cette vaste concession de près de 450 hectares produisait environ 240 tonnes de thé par an. Son usine est désormais à l’arrêt, victime elle aussi du cycle d’insécurité qui frappe la région depuis plusieurs années.
Une situation qui pourrait empêcher la République démocratique du Congo (RDC) de tirer parti de la hausse attendue de la demande en thé écologique aux États-Unis et en Europe. Selon un rapport publié début 2024 par l’Institut international du développement durable (IISD), cette demande pourrait croître respectivement de +8,4 % et +6,6 % d’ici 2026. D’après les dernières données disponibles de la FAO, la RDC a produit environ 2 000 tonnes de thé en 2020, se classant au 11ᵉ rang des producteurs africains.
Ronsard Luabeya, stagiaire
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