A Kinshasa, ville de 15 à 20 millions d’habitants selon les estimations, la circulation automobile s’est transformée en un véritable casse-tête pour les usagers. Embouteillages interminables, inefficacité croissante des transports publics, routes en mauvais état, déficit de signalisation et de régulation du trafic ont poussé de nombreux habitants à se tourner vers un moyen de transport plus flexible : la moto-taxi, localement appelée Wewa.
Cette tendance, également observée dans plusieurs autres villes de la République démocratique du Congo (RDC), s’est accentuée en 2025. Selon une étude du cabinet congolais Target SARL, réalisée du 1er au 7 mars 2025, dans les 26 provinces du pays, 71 % des usagers désignent désormais la moto-taxi comme leur principal mode de déplacement, contre 67 % en 2023. Ce moyen de transport attire toutes les tranches d’âge, même si son utilisation tend à diminuer légèrement avec l’âge.
« Son succès découle de sa capacité à éviter les embouteillages, à parcourir de courtes distances rapidement, et à offrir des prix plus abordables que les taxis classiques », explique l’étude. Son principal atout reste sa capacité à se faufiler entre les véhicules, réduisant considérablement les temps de trajet, notamment aux heures de pointe.
« Je mettais deux heures pour rejoindre mon lieu de travail en bus. Aujourd’hui, en prenant un taxi-moto, j’y suis en moins de 40 minutes », témoigne Séraphin Mbuyi, vendeur de pagnes au grand marché de Kinshasa, le Zando. « Je vis à Limete, 18e rue. J’étais obligé de sortir très tôt le matin pour faire partie des premiers à arriver au travail, afin d’éviter les embouteillages. Aujourd’hui, je ne sors plus comme ça. Je suis certes stressé, mais je sais que je peux trouver une moto pour m’y conduire », poursuit-il.
Un marché à structurer
En février 2024, la police nationale congolaise (PNC) avait interdit l’accès des motocyclistes à la commune de la Gombe, le quartier le plus huppé de la capitale. Mais cette interdiction est régulièrement bravée. Au carrefour Socimat, en plein cœur de la commune, des motos-taxis proposent ouvertement leurs services aux usagers.
Le secteur reste en réalité non régulé. De nombreux jeunes, issus majoritairement des quartiers populaires, se lancent dans cette activité sans formation ni permis de conduire. Ils circulent sans casque, ne respectent pas le Code de la route et ne souscrivent à aucune assurance, augmentant ainsi les risques pour les passagers. Le faible coût d’acquisition d’une moto et les barrières réduites à l’entrée rendent cette activité accessible pour des milliers de Congolais sans emploi. Les autorités locales reconnaissent la nécessité de structurer ce marché, mais peinent à mettre en place une stratégie cohérente et effective.
Saisissant l’opportunité d’une demande croissante pour un service de transport à moto plus sécurisé et confortable, la plateforme numérique de mobilité Yango, filiale du groupe technologique russe Yandex, a lancé à Kinshasa, en 2023, un service de commande de courses à moto.
Ronsard Luabeya, stagiaire
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