Lors d’une réunion de crise à Kolwezi, tenue deux jours après l’accident survenu le 15 novembre 2025 sur le site minier de Kalando, qui a coûté la vie à une quarantaine d’artisans miniers, le ministre des Mines, Louis Watum Kabamba, a fait une annonce inattendue : « Je peux vous dire officiellement aujourd’hui qu’il y a au moins 64 ZEA (zones d’exploitation artisanale) qui ont été dégagées pour vous ». L’identification de ces ZEA constitue le premier point du plan présenté par le président Félix Tshisekedi lors du Conseil des ministres du 13 juin 2025 pour endiguer, « dans les plus brefs délais », les « effets pervers dénoncés dans l’exploitation artisanale » notamment dans la province du Lualaba.
Parmi les problèmes identifiés par le chef de l’État figure l’envahissement des concessions minières industrielles par les exploitants artisanaux, générant des tensions de cohabitation. Le site de Kalando, où l’accident s’est produit, en est l’un des exemples. Situé à 42 kilomètres au sud-est de Kolwezi, il se trouve sur un permis (PE 2116) appartenant à la société Chemical of Africa (Chemaf), qui affirme l’avoir cédé le 21 juillet dernier à Pajeclem Congo Consulting Sarl. Les exploitants artisanaux n’y accèdent que le week-end, grâce à une autorisation « sociale », une situation propice aux tensions.
Le président Tshisekedi avait demandé que les ZEA identifiées soient « susceptibles de rencontrer les attentes du secteur ». On le saura lors de la divulgation des 64 zones. Selon le ministère, elles ont été déterminées à l’issue d’un travail conjoint avec les services spécialisés (SAEMAPE, Cadastre minier, CEEC) et validées après plusieurs missions techniques de terrain.
EGC au cœur du plan
Le ministre Louis Watum Kabamba a indiqué que les arrêtés instaurant ces ZEA ont déjà été signés. Mais, pour l’heure, on ignore quand ces sites seront effectivement mis à disposition ni quand l’exploitation pourra y démarrer. Celle-ci devrait se dérouler en collaboration avec l’Entreprise générale du cobalt (EGC), filiale de la Gécamines, qui détient le monopole du négoce de la production artisanale des substances minérales stratégiques comme le cobalt, l’un des minerais les plus présents dans la région.
L’EGC affirme avoir mis en place un modèle permettant d’aligner le secteur artisanal sur les standards internationaux afin de faciliter la commercialisation de sa production. Ce modèle repose sur le déploiement de « zones minières contrôlées, équipées de dispositifs de pesée, de mécanismes de paiement direct et de systèmes numériques de suivi, garantissant que chaque tonne soit traçable du site artisanal jusqu’à l’usine de transformation ».
Pour permettre à l’EGC d’exercer pleinement son monopole sur le négoce artisanal des minerais stratégiques, le président Tshisekedi a demandé l’application stricte de toutes les règles — y compris les sanctions — contre les usines et entités de traitement qui achètent illégalement du cobalt artisanal en contournant le monopole légal de l’EGC. Il a également appelé la Gécamines et sa filiale à renforcer leur collaboration financière. L’EGC a en effet besoin de financements pour proposer aux mineurs artisanaux des prix compétitifs et des paiements au comptant — comme dans les circuits illégaux — afin de capter une part significative de la production.
Dans le but de séduire les investisseurs, l’EGC a présenté à Kolwezi une première production de 1 000 tonnes de cobalt artisanal, qualifiée de « structurée, éthique et traçable ». Un volume qui montre néanmoins que l’essentiel de la production artisanale demeure en dehors du circuit légal. D’ailleurs, malgré l’accident, l’activité artisanale se poursuit à Kalando « au nom de la paix sociale ».
Pierre Mokoko et Ronsard Luabeya
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