Les travaux d’asphaltage des axes routiers Kasindi–Beni (80 km) et Beni–Butembo (54 km), dans la province du Nord-Kivu, débuteront au premier trimestre 2026. L’annonce a été faite par Steven Nyembo, chargé du contrôle des travaux chez Dott Services Ltd, l’entreprise mandatée pour exécuter le projet.
Ces chantiers s’inscrivent dans le cadre d’un projet routier transfrontalier plus vaste, officiellement lancé en juin 2021 par les présidents de la République démocratique du Congo (RDC) et de l’Ouganda. L’objectif est d’améliorer la connectivité entre les deux pays, de stimuler les échanges commerciaux et de soutenir les efforts de pacification à l’est de la RDC. Ce projet comprend également la modernisation de l’axe Bunagana–Rutshuru–Goma (89 km), portant à 223 km la longueur totale des routes concernées, pour un coût global est estimé à 551,6 millions de dollars.
Dott Services Ltd s’est engagée à financer 60 % du projet, les gouvernements congolais et ougandais prenant chacun en charge 20 %. Le remboursement des investissements se fera par un système de péage, avec des tarifs réduits grâce aux contributions des deux États. La concession est prévue pour une durée minimale de 15 ans, avec une exécution des travaux initialement fixée à trois ans, selon le ministre congolais des Infrastructures, Alexis Gisaro.
Un projet freiné par l’insécurité
Le projet a connu de nombreux retards. Sur l’axe Bunagana–Rutshuru–Goma, l’insécurité liée à la présence des rebelles du M23 a freiné l’avancement. Quant à la route Kasindi–Beni–Butembo, les travaux ont été suspendus pendant plus d’un an en raison du non-respect de certaines clauses contractuelles, notamment celles relatives à l’exonération des équipements importés d’Ouganda.
Pour lever ces obstacles, un avenant à l’accord initial a été signé entre la RDC et l’Ouganda le 16 octobre 2024. Celui-ci prévoyait notamment l’exemption des taxes sur les équipements nécessaires à l’exécution des travaux.
La relance du chantier est intervenue à la suite de la visite, en mars 2025, du ministre ougandais des Travaux publics, le général Edward Katumba Wamala. À cette occasion, les autorités des deux pays ont réaffirmé leur engagement à concrétiser le projet.
Corridor stratégique
À ce jour, la première phase des travaux, réalisée en terre battue sur l’axe Kasindi–Beni, affiche un taux d’exécution de 80 %, selon Papy Minga, directeur provincial de l’Office des routes au Nord-Kivu. Les préparatifs à l’asphaltage sont également en cours : un concasseur est en cours d’installation, une centrale d’enrobé est attendue, et des carrières de pierres ont été ouvertes à Kilya (secteur de Ruwenzori) et Rugetsi.
Cette route est d’importance stratégique à plusieurs égards. Sur le plan sécuritaire, elle facilite les opérations militaires conjointes SHUJAA, menées par les FARDC et les UPDF contre les rebelles ADF. Économiquement, elle constitue un axe essentiel pour l’exportation de produits agricoles (café, cacao) vers l’Ouganda via le poste frontalier de Kasindi, tout en permettant l’entrée de produits de consommation, notamment du carburant, vers les villes de Beni, Butembo et leurs environs.
Dans le cadre de la relance des travaux, le gouverneur militaire du Nord-Kivu, le général-major Somo Kakule Evariste, a décidé de réaffecter les recettes générées par les péages sur ces axes. Ces fonds, autrefois perçus par les entreprises chargées de l’entretien routier, financeront désormais les projets de réhabilitation des voiries urbaines de Beni et Butembo, longtemps retardés par des contraintes budgétaires. Selon des sources locales, les tarifs de péage appliqués varient entre 2 et 20 dollars américains, selon la catégorie de véhicule.
La modernisation de cette infrastructure est vivement attendue par les populations locales, qui y voient une opportunité d’amélioration de la mobilité, de la sécurité et du développement économique dans cette zone du Grand Nord.
Timothée Manoke, stagiaire
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